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Archives pour janvier 2011

Anne Francis (1930-2011) et Pete Postlethwaite (1946-2011)

L’année commence bien mal pour les cinéphiles… Ce 2 janvier 2011, une sale maladie aux vilaines pinces a emporté à quelques heures d’intervalle deux noms familiers du grand écran. Anne Francis et Pete Postlethwaite n’étaient pas des stars attirant les foules à l’annonce de leur seul nom, mais des personnalités attachantes, liées à de grands souvenirs des salles obscures…

 

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Anne Francis s’est éteinte à l’âge de 80 ans. Les plus jeunes spectateurs ignorent sans doute qui était cette actrice, qui s’illustra surtout à la télévision américaine (dans toutes les séries classiques, d‘ALFRED HITCHCOCK PRESENTE à COLUMBO en passant par MISSION IMPOSSIBLE, LE FUGITIF et tant d‘autres), mais leurs aînés associeront son nom à des classiques des fifties, qui fleuraient bon les dernières séances en noir et blanc ou Technicolor rutilant.  

Petite, blonde, piquante et vive, Anne Francis s’illustra notamment dans BAD DAY AT BLACK ROCK / UN HOMME EST PASSE, de John Sturges (1955). Elle y était Liz Wirth, la petite garagiste qui ose se rebeller contre la loi du plus fort, imposée par une belle bande de «rednecks» racistes : Robert Ryan, Ernest Borgnine et Lee Marvin… Seul Spencer Tracy est de son côté dans ce très bon drame à l’ambiance western, virulente condamnation du racisme contre les américano-japonais durant la 2e Guerre Mondiale.

On la revit aussi en 1955 dans BLACKBOARD JUNGLE / GRAINE DE VIOLENCE, le classique de Richard Brooks. Elle incarne Anne Dadier, la fragile épouse de Glenn Ford, menacée par une bande de petits voyous du Bronx menés par Vic Morrow.

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Anne Francis (1930-2011) et Pete Postlethwaite (1946-2011) dans Hommage Image14

Les aficionados de la science-fiction connaissent par cœur PLANETE INTERDITE de Fred McLeod Wilcox, sorti en 1956. 

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Bien avant STAR TREK (Gene Roddenberry s’inspira largement de ce film pour créer la série télévisée originale) et STAR WARS, ce fut le tout premier space-opéra à grand spectacle produit à Hollywood, en couleurs et CinémaScope, à une époque héroïque où les réalisateurs devaient faire preuve d‘ingéniosité et de bricolage pour donner vie à des mondes fantastiques, sans pouvoir recourir aux images de synthèse qui n‘existaient bien sûr pas du tout ! Cette relecture de LA TEMPÊTE de Shakespeare vieillit fort bien, grâce à ses ingénieux décors, ses effets visuels réussis, un scénario intelligent… et l’indispensable Robby le Robot ! Robby qui veille comme un dévoué majordome sur Altaïra, fille du Docteur Morbius (Walter Pidgeon), et objet de la convoitise de l’équipage du capitaine Adams (le défunt Leslie Nielsen, jeune premier très «Capitaine Kirk» bien longtemps avant ses pitreries chez les ZAZ !). Il faut dire que Miss Francis porte de fort seyantes tenues, des minijupes métalliques d’un effet imparable sur l’équipage d’astronautes privé de femmes !

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Et, toujours dans le registre du Fantastique et de la SF, Anne Francis fut aussi une familière de la légendaire série TWILIGHT ZONE / LA QUATRIEME DIMENSION, de Rod Serling. Elle y fut la vedette de deux épisodes : JESS-BELLE, où elle est brune, sorcière et affole un petit village ; et surtout THE AFTER HOURS / LE NEUVIEME ETAGE, un petit chef-d’œuvre de terreur et de suggestion écrit par Serling. Elle y joue Marsha White, cliente ordinaire d’un grand magasin où un inquiétant vendeur l’emmène visiter un étage qui n’est pas supposé exister… et ses non moins effrayants occupants.

«Maaaarsha… Maaaarsha… viens ici, chérie…»

 

Lien Wikipédia de la carrière et de la filmographie d’Anne Francis :

http://en.wikipedia.org/wiki/Anne_Francis 

 

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Et Pete Postlethwaite s‘en est allé paisiblement, après une lutte douloureuse contre la maladie, à l‘âge de 64 ans… Impossible d’oublier le visage de ce grand comédien formé à la Royal Shakespeare Company. Une gueule magnifique, burinée et taillée tout en angles, un visage et une voix rugueuses à souhait… il a créé des personnages mémorables, certains attachants, d’autres ambigus ou menaçants, et, quelle que soit la qualité du film dans lequel il joua, le vieux Pete n’était jamais mauvais. «Le meilleur acteur au Monde» selon Steven Spielberg, pas moins. Il n’avait pas tort !

Vous pourrez apprécier quelques extraits de ses grands films ci-dessous. Désolé, l’image est parfois de mauvaise qualité…  

La notoriété de Postlethwaite au cinéma fut tardive, mais sa filmographie, elle, demeure impressionnante. Sa toute première apparition, ultra-brève, fut dans LES DUELLISTES (1977), du débutant Ridley Scott. Il campe un soldat coiffant le général napoléonien joué par Robert Stephens. Citons aussi, une autre apparition, bien plus tard, dans ALIEN 3 (1992) d’un autre brillant débutant, David Fincher. Il campe l’inquiétant détenu David, qui finit sous les griffes du monstre durant la mortelle partie de cache-cache dans la prison labyrinthique. Et il apparaît brièvement en officier anglais dans LE DERNIER DES MOHICANS (1992) de Michael Mann, aux côtés de Daniel Day-Lewis.

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Daniel Day-Lewis qu’il retrouvera l’année dans suivante dans un second film… et quel film ! AU NOM DU PERE de Jim Sheridan. Une véritable claque, un chef-d’œuvre qui réussit à vous indigner contre toute violence politique, qu’elle soit celle de l’État ou du terrorisme.

Postlethwaite joue Giuseppe Conlon, le père malingre du bouillant et rebelle Gerry (Day-Lewis), petite frappe irlandaise qui a le malheur d’être à Londres le 5 octobre 1974. Près du parc où Gerry passe la nuit, l’IRA dépose une bombe meurtrière dans un pub de Guildford. L’opinion publique choquée veut vite les coupables, et la police Britannique n’hésite pas à recourir à la garde à vue forcée, la torture, les fausses preuves et les faux témoignages pour faire de Gerry et trois de ses copains les parfaits boucs émissaires. Pire, ils arrêtent et emprisonnent la famille de Gerry, dont son propre père. Tous sont innocents, et pourtant, tous écoperont de lourdes peines de prison… Giuseppe y laissera même la vie. Drame terrible, magnifiquement filmé par Sheridan qui prend fait et cause pour les Conlon père et fils, tout en les confrontant violemment. Sheridan qui ne prend pas de gants non plus pour dénoncer la violence de l’IRA, encouragée hélas dans cette voie par la répression du gouvernement britannique, durant les terribles années ayant suivi le «Bloody Sunday» de 1972.  

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Pete Postlethwaite est absolument bouleversant dans le rôle du vieux Giuseppe, ce vieil homme honnête, juste, mais sévère avec son fils qui a tourné petit délinquant… Pour les besoins du drame, Sheridan rassemble ses deux protagonistes dans la même cellule, filmant une réconciliation lente, douloureuse, et profondément touchante. Le jeu explosif de Day-Lewis est parfaitement accordé à l’interprétation, toute en retenue, de Postlethwaite. Impossible, devant la scène de sa mort et la réaction des co-détenus dans le film, de ne pas pleurer… Pour sa performance, Postlethwaite sera justement nommé à l’Oscar du Meilleur Second Rôle.

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En 1996, Postlethwaite est de nouveau acclamé à juste titre dans le film de Mark Herman, BRASSED OFF ! / LES VIRTUOSES. À la fois drame et comédie, ce petit bijou décrit avec humanisme les galères des mineurs de Grimley, petite ville du Yorkshire qui subit de plein fouet, en cette année 1983, les plans sociaux violents, imposés par Margaret Thatcher et son gouvernement. La ville est divisée, la communauté des mineurs subit les affres du chômage, mais le vétéran Danny Ormondroyd, chef de la fanfare de Grimley, veut à tout prix diriger son orchestre pour la grande finale à l’Albert Hall. Quitte à accepter des entorses au règlement – une femme dans l’orchestre, du jamais vu ! -, à cacher à tous la silicose qui lui bouffe les poumons et à se brouiller avec son fils accablé de dettes… La musique est la passion qui maintient Danny en vie, mais qu’elle est dure, la route qui mène au grand concert final. Le vieux mineur bourru délivrera un discours mémorable, refusant le trophée de la victoire, magistral bras d’honneur à la politique destructrice sociale de Miss Thatcher. Une nouvelle fois, le gouvernement anglais et ses monstrueuses erreurs sont sérieusement giflés en pleine face… Postlethwaite est une nouvelle fois magnifique.

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Un talent révélé sur le tard au cinéma, mais qui n’échappe pas à l’œil exercé de Steven Spielberg qui lui offre un rôle en or en 1997 pour LE MONDE PERDU, la suite de JURASSIC PARK. Postlethwaite est un adversaire de taille, pour le Tyrannosaure qu’il rêve d’abattre. Il est Roland Tembo, le chasseur qui a tout vu, traqué et tué… sauf les dinosaures en liberté sur Isla Sorna. Certes, le spectacle est largement assuré par les effets spéciaux et les scènes d’action, mais Spielberg laisse à Postlethwaite le soin d’interpréter un personnage fort en gueule, cynique, impitoyable et malgré tout (presque) sympathique ! Son entrée en scène à la tête d’une armée de chasseurs motorisés, pour un safari épique, est une scène d‘anthologie.  

Dommage que, pour des raisons de durée, Spielberg ait dû sacrifier la véritable scène d’introduction de Tembo, visible ci-dessous.

Elle se trouve sur les laserdiscs et DVD du film. Passez la première scène du conseil d’administration pour découvrir (au bout de 3 minutes) l’entrée en scène de Roland Tembo, se morfondant dans un bar en Afrique. Son copain de chasse le convainc de se joindre à une nouvelle expédition, et Tembo retrouve ses vieux réflexes. Il corrige même joliment un gros beauf qui ennuie la serveuse locale ! Un grand moment digne de John Ford, John Huston et du CHASSEUR BLANC CŒUR NOIR de l’ami Eastwood !  

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Impossible de citer tous les personnages qu’a incarné Postlethwaite dans sa carrière. Nombre d’entre eux nous sont connus et, même s’il s’agit de rôles secondaires, l’acteur leur apportera sa présence unique. Citons Kobayashi dans USUAL SUSPECTS de Bryan Singer (1995) : avocat hiératique, maître chanteur impavide… mais aussi agent du terrifiant gangster Kaiser Sozë. À moins qu’il ne soit Kaiser Sozë lui-même ?

Enchaînant tout de suite après LE MONDE PERDU, Steven Spielberg et Pete Postlethwaite travaillent de nouveau ensemble dans le puissant drame historique AMISTAD. Aux côtés du magnifique Djimon Hounsou, de Matthew McConaughey, et des vieux briscards Morgan Freeman et Anthony Hopkins, Postlethwaite incarne l’inflexible procureur Holabird, le seul à ne pas s’émouvoir du drame des africains victimes de l’abominable traite négrière en cette année 1839… Il faut dire que Holabird a la consigne de «charger» Cinqué (Hounsou) et les autres mutins, consigne venue de la Maison Blanche et du Président Van Buren qui veut à tout prix éviter la guerre civile contre les sudistes esclavagistes.

Parmi les autres grands personnages ambigus incarnés par l’acteur, citons Lorbeer, médecin marron de THE CONSTANT GARDENER, le remarquable film de Fernando Meirelles (2005) dénonçant avec virulence l’emprise des multinationales pharmaceutiques. Le paisible jardinier joué par Ralph Fiennes, enquêtant sur la disparition de son épouse (Rachel Weisz) découvre avec horreur des Africains transformés en cobayes involontaires des grands laboratoires pharmaceutiques. Résultat : des milliers de morts et d’agonisants, ignorés volontairement… Fiennes rencontre Postlethwaite dans une scène importante ; le vieux médecin cherche à expier ses crimes en soignant les malades d’un petit village, mais il est déjà résigné au pire. Encore une puissante prestation du comédien.

 

Terriblement affaibli par la maladie, Postlethwaite continuera vaille que vaille à exercer son art au théâtre, à la télévision et au cinéma.

L’acteur se rappellera à notre bon souvenir lors de belles et hélas trop courtes séquences dans trois films de 2010. Dans LE CHOC DES TITANS, il est Spyros, le vieux pêcheur père adoptif du héros Persée (Sam Worthington), et connaît un sort tragique par la faute de Hadès (Ralph Fiennes).

Puis Christopher Nolan le fait participer au triomphe d’INCEPTION. Il est Maurice Fischer, père richissime de Robert Fischer (Cillian Murphy), «inceptionné» par l’équipe de Cobb (Leonardo DiCaprio). Pour des raisons de santé évidente, Postlethwaite n’a qu’un temps de présence limité à l’écran, mais il a une nouvelle scène inoubliable. Robert le retrouve mourant, alité, au fin fond de la forteresse montagnarde où l’équipe l’a conduit. Une confrontation intense entre le père et le fils, superbement filmés par Nolan, scène terrible qui prend une dimension tragique encore plus forte avec le décès de Postlethwaite.

Enfin, dans l’excellent THE TOWN, second film de Ben Affleck, Postlethwaite fait une nouvelle apparition exceptionnelle : il est Fergie Colm, en apparence un paisible fleuriste, en réalité redoutable caïd irlandais de Charlestown, l’un des quartiers les plus durs de Boston. Regardez-le qui menace Doug (Ben Affleck), plongeant son regard d’acier dans celui du braqueur repenti…  

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C’est son avant-dernière apparition à l’écran. Son dernier film, la comédie KILLING BONO, sortira en Grande-Bretagne en avril 2011.   

Avec la nouvelle du décès de Pete Postlethwaite, j’ai eu un coup au cœur… Comme si un membre de ma famille s’en était allé. Merci pour tout, Pete. Merci d’avoir été Giuseppe, Danny, Tembo et les autres. Les gars de l’orchestre des VIRTUOSES veulent te rendre un dernier hommage. So long.  

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Lien Wikipédia de la carrière et de la filmographie de Pete Postlethwaite :

http://en.wikipedia.org/wiki/Pete_Postlethwaite



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