Petit cadeau bonus à l’occasion de la sortie de DARK SHADOWS… Voici un mini-guide spécial «Tim Burton, Johnny Depp & Helena Bonham Carter», une revue rapide de leurs films précédents (avec les têtes différentes des comédiens transformés à l’occasion de chaque film !).
EDWARD AUX MAINS D’ARGENT (1990)
L’histoire : Edward (Johnny Depp), un jeune homme artificiel, est affublé de ciseaux démesurés à la place de ses mains, son inventeur (Vincent Price) étant mort avant d’avoir pu les lui donner. Solitaire et craintif, il est recueilli par Peg Boggs (Dianne Wiest), représentante en cosmétiques, qui fait de lui un membre à part entière de sa famille. Mais, dans le petit monde confortable de la banlieue, la présence d’Edward détonne ; et il est amoureux de Kim (Winona Ryder), la fille de Peg…
L’avis : magique, il n’y pas d’autre mot pour désigner le film qui marqua en fanfare les débuts de l’association Johnny Depp-Tim Burton. Relecture toute personnelle des vieux films de Frankenstein, EDWARD… est aussi un autoportrait de Burton à peine dissimulé. L’histoire d’amour est touchante, la description de la banlieue et du conformisme de ses habitants fait mouche. Et la musique de Danny Elfman est entrée dans la mémoire collective.
Le meilleur moment de Johnny Depp : difficile d’en séparer un, dans ce film plein de moments privilégiés. Son impassible réaction quand Dianne Wiest lui tartine le visage de lotions colorées ; quand il provoque l’orgasme de Kathy Baker en lui coupant les cheveux ; quand il coupe la mèche d’un gentil toutou venu s’asseoir à ses côtés… Une scène inoubliable, enfin, celle où il assiste à la mort de son inventeur (Vincent Price)…
ED WOOD (1994)
L’histoire : les déboires d’Edward D. Wood Jr. (Depp), jeune cinéaste au début de sa carrière dans les années 1950 ; persuadé de son talent, rêvant de percer à Hollywood, Wood va enchaîner les tournages de plus en plus fauchés, entouré d’une bande de bras cassés qui lui resteront loyaux ; parmi eux, une légende déchue en fin de carrière, Bela Lugosi (Martin Landau), star des films d’épouvante ayant sombré dans la misère et la drogue…
L’avis : honteusement oublié par le Jury du Festival de Cannes de 1995, ED WOOD reste une des plus belles déclarations d’amour au Cinéma, tout en prenant le contrepoint total des «biopics» traditionnelles. Entre l’humour (les reconstitutions des tournages «galères») et la tristesse, le film trouve son équilibre parfait. Depp est excellent, Martin Landau est inoubliable et fut récompensé à juste titre de l’Oscar du Meilleur Second Rôle.
Le meilleur moment de Johnny Depp dans le film : difficile de trancher là encore, tant il y en a… Morceaux choisis : quand il tente de vendre des projets foireux à un grand ponte («Docteur… Acula !») ; sa réaction au rejet de ce dernier («le pire film que vous ayiez jamais vu ? … Hé bien, le prochain sera bien meilleur !») ; toutes ses scènes avec Martin Landau, notamment celle, irrésistible, du tournage de GLEN OR GLENDA («Bivère…. Poul ze strinks ! Poul ze strinks !!») ; la danse des sept voiles en fête de tournage ; et la rencontre avec Orson Welles qui va le galvaniser pour son «chef-d’œuvre» ultime, PLAN 9…
SLEEPY HOLLOW (1999)
L’histoire : adaptation libre du récit de Washington Irving, «La Légende du Val Endormi» ; à la fin du 18ème siècle, Ichabod Crane (Depp) un jeune inspecteur féru de science, se rend à Sleepy Hollow pour enquêter sur des meurtres en série que la population effrayée attribue à un spectre terrifiant, le Cavalier Sans Tête (Christopher Walken et Ray Park). D’abord sceptique, Ichabod réalise que le Cavalier est bien réel et tente de protéger la jolie Katrina Van Tassel (Christina Ricci) de la malédiction qui s’abat sur sa famille…
L’avis : après la déconvenue d’un SUPERMAN avorté par le studio Warner Bros., Burton revient aux univers gothiques macabres qu’il affectionne. Le film, particulièrement saignant et macabre (Burton va même très loin en filmant le massacre d’une famille entière par le Cavalier) est visuellement splendide, recréant les ambiances des films de la Hammer et de Mario Bava. On pardonnera les excès du scénario pour mieux apprécier l’ambiance du film. Et encore une très belle musique signée de l’ami Danny Elfman.
Le meilleur moment de Johnny Depp dans le film : ses évanouissements de jeune fille, qui ponctuent le film… Et la séquence où Ichabod Crane a une façon bien à lui de jouer aux EXPERTS sur les lieux d’un meurtre. Il sermonne le docteur local, peu au courant des nouvelles procédures policières :
«Il ne faut jamais déplacer le cadavre !
– Pourquoi ?
- (silence gêné d’Ichabod)… parce que.»
LA PLANETE DES SINGES (2001)
L’histoire : l’astronaute Leo Davidson (Mark Wahlberg) plonge dans une tempête spatiale électromagnétique pour sauver un de ses singes cobayes, Périclès… Mais, égaré dans l’espace et le temps, Leo fait naufrage sur une planète inconnue, où les humains réduits à l’état sauvage sont chassés, tués ou réduits en esclavage par des singes évolués. Déterminé à fuir cette planète infernale au plus vite, Leo entraîne à sa suite des fugitifs, dont la chimpanzée Ari (Helena Bonham Carter), et doit échapper à la fureur du redoutable Général Thade (Tim Roth)…
L’avis : Tim Burton n’est pas satisfait de cette nouvelle adaptation du roman de Pierre Boulle, très éloignée du classique avec Charlton Heston. L’histoire est franchement décousue, le protagoniste principal manque de personnalité face à des singes bien plus réussis, et les scènes de batailles n’intéressent pas vraiment Burton, qui préfère laisser libre cours à sa fantaisie habituelle dans les séquences de la Cité des Singes. Il reste que le film marque un point important pour le cinéaste, puisqu’il fait jouer pour la première fois Helena Bonham Carter, sa future épouse.
Le meilleur moment d’Helena Bonham Carter : si l’actrice se fait voler la vedette par Tim Roth durant le dîner officiel entre singes, elle a droit à un traitement de faveur durant tout le film, jouant la plus sensible et charmante guenon que l’on ait jamais vu dans un film. Mark Wahlberg est presque prêt à rester auprès d’elle, voyez leur échange de regards au moment de la séparation finale…
BIG FISH (2003)
L’histoire : quand il apprend que son père Edward (Albert Finney) est mourant, Will Bloom (Billy Crudup) rentre au pays avec sa compagne Joséphine (Marion Cotillard). En froid avec ce père fantaisiste, qui adore raconter des histoires fantastiques sur sa vie, Will renoue peu à peu avec lui, tandis qu’il raconte l’histoire de sa vie en jeune homme (Ewan McGregor), croisant des géants, des sirènes et des loups-garous avant de tomber amoureux de Sandra (Allison Lohman)…
L’avis : marqué par le décès de son père, et lui-même sur le point de devenir père pour la première fois, Burton trouve dans BIG FISH le sujet idéal pour parler de la paternité, de la transmission filiale. Un très beau film où le cinéaste adapte sa fantaisie visuelle habituelle à plus de gravité, de maturité, dans un scénario solide. Le casting d’ensemble est parfait, avec une préférence pour le père vieillissant joué par Albert Finney.
Le meilleur moment de Helena Bonham Carter : l’actrice tient un double rôle, étant à la fois l’inquiétante Sorcière borgne, et Jenny, la jeune femme du sud au cœur solitaire. Son apparition en sorcière montrant au jeune Edward Bloom sa mort future est un premier moment fort ; ses retrouvailles, en tant que Jenny, avec Edward (McGregor), forment une jolie scène douce-amère.
CHARLIE ET LA CHOCOLATERIE (2005)
L’histoire : un jeune garçon très pauvre, Charlie Bucket (Freddie Highmore), découvre par hasard un des cinq tickets gagnants invitant à la visite de la fabuleuse chocolaterie de Willy Wonka (Depp), inventeur-confiseur génial et reclus. Avec son grand-père, Charlie découvre les secrets de fabrication de Wonka. Quatre autres enfants, odieux garnements, et leurs parents, sont également de la visite. Mais qui sera l’heureux héritier de l’étrange Willy Wonka ?
L’avis : l’adaptation du classique écrit par Roald Dahl permet à Burton de déchaîner sa créativité. L’histoire reste simple, assez prévisible parfois, mais toujours pleine d’idées étoffant le récit original. Visuellement, c’est un régal. Et Depp est parfait en incarnant un Willy Wonka parfois inquiétant…
Le meilleur moment de Johnny Depp et Helena Bonham Carter : premier film en commun des deux acteurs, CHARLIE ne leur offre pas vraiment de scènes communes. Volontairement en retrait, Helena Bonham Carter joue l’aimante maman de Charlie, le temps de quelques scènes où elle cuisine les choux toute la journée ! Depp déguisé en Willy Wonka se livre à un festival de scènes cultes : son entrée en scène, avec la chanson à sa gloire façon «It’s A Small World» qui tourne à la catastrophe ; ses appels des Oumpas-Loumpas, en imitant le cri du dindon (comme Jacques Villeret dans LA SOUPE AUX CHOUX !) ; la transformation du Monolithe de 2001 L’ODYSSEE DE L’ESPACE en tablette de chocolat ; les bafouillis répétés de Willy Wonka dès qu’il prononce le mot «parent»…
CORPSE BRIDE – LES NOCES FUNEBRES (2005)
L’histoire : pauvre Victor Van Dort (Depp) ! Ce gentil et timide jeune homme doit épouser par convenance Victoria Everglot (Emily Watson), mais sa maladresse l’empêche de prononcer les vœux de fiançailles… S’entraînant dans la forêt à passer le futur anneau de mariage sur ce qu’il croit être une branche morte, Victor a la surprise de voir que ladite branche est en fait la main d’une morte, Emily (Bonham Carter), qui se retrouve ramenée à la vie, et se croit de fait fiancée au jeune homme terrorisé…
L’avis : douze ans après NIGHTMARE BEFORE CHRISTMAS (L’ETRANGE NOËL DE MONSIEUR JACK), Tim Burton revient au cinéma d’animation en stop-motion. Un film gothique, très gracieux, où les vivants sont bien «morts» de conformisme, alors que les morts, eux, s’amusent bien ! Un seul petit regret, peut-être ? Que le héros choisisse d’épouser finalement la sage fille de bonne famille plutôt que la charmante morte-vivante, véritable héroïne du film…
Le meilleur moment de Johnny Depp et Helena Bonham Carter : certes, c’est un film d’animation, où les acteurs n’assurent «que» le doublage de leurs personnages… ce qui n’enlève rien au crédit du film, bien au contraire. On aura une préférence pour le duo au piano, où Victor rattrape une précédente gaffe, et marque ainsi des points avec la belle trépassée Emily !
SWEENEY TODD (2007)
L’histoire : le barbier Benjamin Barker (Depp) a jadis perdu sa femme Lucy et leur petite fille, par la faute de l’odieux Juge Turpin (Alan Rickman) qui l’a envoyé en prison à l’autre bout du monde. Revenu à Londres, Barker se fait désormais appeler Sweeney Todd, et apprend par la misérable cuisinière Mrs. Lovett (Bonham Carter) que Lucy est morte après avoir été violée par le Juge. Todd prépare une vengeance sanglante, à coup de rasoirs, aidé par Mrs. Lovett qui va cacher les traces des meurtres en recyclant les cadavres en viande pour tourte…
L’avis : une fausse bonne idée ? La comédie musicale macabre de Stephen Sondheim semblait pourtant faite pour Burton, qui revient dans l’ambiance horrifique gothique de son précédent SLEEPY HOLLOW… C’est sans doute le film le plus noir, radical, jamais tourné à ce jour par le cinéaste, mais il reste insatisfaisant : le scénario doit tailler dans le matériel de départ, alourdi par trop de chansons qui ne restent pas dans les mémoires. On se console en appréciant l’ambiance visuelle du film, et le jeu des acteurs, notamment Bonham Carter, Alan Rickman en juge libidineux et Sacha Baron Cohen en barbier concurrent, très «Freddie Mercury», au faux accent italien !
Le meilleur moment de Johnny Depp et Helena Bonham Carter : quel dommage que les chansons soient aussi faiblardes en général… à sauver, le duo «A Little Priest» où les deux complices choisissent en chantant qui va finir en pâtée. Et le final funeste, sanglant et volontairement grand-guignolesque, qui finit très mal pour les deux vedettes.
ALICE AU PAYS DES MERVEILLES (2010)
L’histoire : vingt ans après avoir vécu ses aventures oniriques au Pays des Merveilles, la petite Alice est maintenant une jeune femme (Mia Wasikowska) qui va devoir se marier à un benêt. Mais, en suivant un Lapin Blanc familier, elle fuit la cérémonie officielle et tombe de nouveau dans un trou, la menant vers le Pays des Merveilles où tout a bien changé depuis son dernier voyage… Alice a tout oublié de ses précédentes aventures, et seuls quelques vieux amis, dont le Chapelier Fou (Depp), peuvent l’aider à combattre la colérique Reine Rouge (Bonham Carter) ennemie de sa sœur la Reine Blanche (Anne Hathaway)…
L’avis : hum hum (…d’Umbridge)… le film est assez symptomatique des défauts de Burton en tant que cinéaste. Comme toujours, la création visuelle unique surclasse tout le reste, et ALICE est inattaquable sur cet aspect. Du point de vue narratif, par contre… le film part régulièrement en roue libre, et il est difficile de s’intéresser au traitement très «heroic fantasy» au goût du jour de cette adaptation de Lewis Carroll.
Le meilleur moment de Johnny Depp et Helena Bonham Carter : difficile à trouver, pour une fois… Depp cabotine ici sans trop réussir à plaire, faisant du Chapelier un quasi clone de son Willy Wonka. Personne n’est parfait. On préfèrera les scènes de colère capricieuse de Miss Bonham Carter, affublée d’une tête démesurée et tyrannisant tout le monde avec délices. Ne volez pas ses tartes !