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Aspie, or not Aspie ? Le Petit Abécédaire Asperger, chapitre 3

C comme…

 

Aspie, or not Aspie ? Le Petit Abécédaire Asperger, chapitre 3 dans Aspie c-henry-cavendish-asperger

… Cavendish, Henry (1731-1810) 

 

Ce scientifique britannique, à la fois chimiste, physicien et philosophe en histoire naturelle, fut le découvreur de l’hydrogène, et l’auteur de travaux sur la mesure de la gravitation et sur l’électricité, tout au long du 18ème Siècle.

Au vu de quelques biographies sommaires, Cavendish semble curieusement n’avoir pas « existé », en dehors de ses travaux. Comme si ce grand savant ne s’était exprimé que par ses seules recherches. Le médecin et écrivain Oliver Sacks en a déduit, en se basant sur les témoignages de son comportement excentrique et asocial, que Henry Cavendish devait être atteint du syndrome d’Asperger, même si cette théorie est discutée.

Peu d’informations sur sa jeunesse. On sait que Cavendish était le fils d’un lord, figure éminente de la vie politique et scientifique de l’époque, et qu’il perdit sa mère très jeune. Après une scolarité dans une école privée, Cavendish étudia les sciences au Peterhouse College de Cambridge, dont il sortit en 1753 sans aucun diplôme, après trois ans d’études… Héritier d’un de ses oncles, il va acquérir un cabinet de physique et une grande bibliothèque, vivant avec son père. Il suit ce dernier, notamment dans des rencontres à la Royal Society et le Royal Society Club, dont il sera un membre respecté, mais aussi l’un des plus asociaux.

Ne faisant pas étalage de sa richesse, le fortuné Cavendish vivait à la spartiate, tout en aidant financièrement étudiants et miséreux. Ses recherches toucheront aux domaines de la mécanique, de l’optique, du magnétisme, et surtout de la chimie. Utilisant des méthodes de travail inédites pour l’époque, il créera l’hydrogène, gaz inflammable qu’il parvient à isoler, et le gaz carbonique (dioxyde de carbone), dépassant en précision les travaux de Lavoisier en France. Ses autres expériences l’aideront à mesurer la constante de gravitation d’Isaac Newton et de là, à établir la densité moyenne de la Terre. Ceci n’étant qu’une réussite parmi d’autres très nombreuses avancées et observations réalisées par ses soins.

Mais par ailleurs, Cavendish était un homme solitaire. Silencieux, maladivement timide et hypersensible, il détesta dès sa jeunesse la société et l’idée du mariage. Il refusait de regarder les femmes, même ses servantes à qui il s’adressait par écrit, et se fit construire un petit escalier pour éviter de rencontrer sa femme de ménage. Sa conduite était tout aussi évitante envers le Royal Society Club, manquant souvent des réunions hebdomadaires pour continuer ses travaux en laboratoire… Et lorsqu’il était présent, sa conduite avait de quoi dérouter : des confrères demandant son point de vue sur un sujet de recherche bien précis ne devaient pas s’adresser directement à lui. Et s’il jugeait la conversation intéressante, Cavendish marmonnait une réponse, avant de se réfugier dans un coin plus tranquille dès que les regards se tournaient vers lui…

Conduite singulière qui faisait partie d’un ensemble d’autres « excentricités » traduisant un profond malaise du principal intéressé. Cavendish ne s’habillait pas à la mode, et porta le même chapeau durant trente années. Il refusa toujours de se faire peindre en portrait, les images que nous avons de lui provenant des esquisses dessinées durant ses réunions officielles. On ne lui connaissait aucune relation proche, en dehors des membres de sa famille. Et, en dehors de la science, il ne s’intéressait qu’à sa collection de meubles élégants.

Son comportement timide et secret fit qu’il ne publia qu’à grand peine ses travaux. Ses manuscrits non publiés, préservés dans les archives familiales durant soixante ans, vont lui assurer une renommée posthume. Le physicien James Clerk Maxwell, premier directeur du laboratoire de physique de Cambridge dédié à Cavendish les déchiffrera et publiera. Et le monde scientifique de redécouvrir que ce grand timide de Cavendish avait défini les principes de la thermodynamique moderne, étudié les forces électrostatiques avant Coulomb, conçu la résistance électrique avant Ohm, etc. …

Curieux personnage donc que ce Cavendish refusant les mondanités et les honneurs qu’il aurait pourtant pu obtenir de son vivant, préférant le silence et le travail à toute tentative de socialisation.

 

Cf. Isaac Newton, Oliver Sacks

 

c-conseil-peter-lorre-dans-20-000-lieues-sous-les-mers dans or not Aspie ?

… Conseil, dans le roman 20 000 LIEUES SOUS LES MERS, de Jules Verne.

 

Cherchant à rendre scientifiquement crédible son futur roman d’aventures sous-marines, Jules Verne se tourna vers un ingénieur français, Jacques-François Conseil, pour lui fournir tous les éclaircissements techniques concernant le sous-marin qu’il imagine : le Nautilus du Capitaine Nemo… En gage de remerciement pour tous ses bons conseils, ce grand amateur de noms « codés » qu’était Verne donnera celui de Conseil à l’un des personnages du roman.

Conseil est donc le domestique et assistant du professeur Aronnax, le narrateur ; un jeune homme belge décrit par son maître comme un «brave garçon», flegmatique en toute occasion. Calme et imperturbable face aux colères de son ami le bouillant harponneur Ned Land, Conseil a une particularité typique de l’Asperger : il est une véritable encyclopédie vivante, classificateur maniaque du règne animal. Ayant vécu et travaillé aux côtés de l’éminent zoologue Aronnax, Conseil fait preuve d’une mémoire exceptionnelle pour classer toutes les espèces d’animaux par embranchement, ordre, genre, famille, genre, etc. qu’il se fera un plaisir d’énumérer. Mais curieusement, il est incapable de reconnaître visuellement l’animal qu’il classifie

Un personnage secondaire, donc, qui serait vite oublié des lecteurs de Verne s’il n’était pourvu de cette particularité faisant de lui un « proto-Aspie » de fiction… On peut certes deviner que Jules Verne, dans le cadre des romans éducatifs pour la jeunesse qu’il était tenu d’écrire par contrat, avait créé ce personnage dans le seul but d’instruire le lecteur sur la classification scientifique des animaux marins. Mais on peut aussi se demander si l’écrivain français n’avait pas eu une sorte de prémonition… en s’attachant par ailleurs à imaginer des figures de savants excentriques, distraits, plongés dans leurs expériences, qui peuplent ses romans, Verne avait-il « deviné » le syndrome ? A moins que ces énumérations et classifications permanentes dans ses romans, qui rebutent quelque peu le lecteur moderne, ne traduisent chez l’écrivain un très hypothétique syndrome d’Asperger…

Quoiqu’il en soit, de toutes les adaptations cinématographiques plus ou moins fidèles de 20 000 LIEUES SOUS LES MERS, la plus célèbre reste celle produite par Walt Disney en 1954 et mise en scène par Richard Fleischer ; Conseil y est incarné par Peter Lorre. Personnage comique et passablement poltron, Conseil perd ici ses quelques caractéristiques « Aspies »… On sera curieux de voir ce que le cinéaste David Fincher, qui planche activement sur une nouvelle version du film, fera du personnage, lui qui nous avait décrit un beau cas d’Asperger avec son portrait de Mark Zuckerberg dans THE SOCIAL NETWORK.

 

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… Cooper, Sheldon (Jim Parsons), dans la série THE BIG BANG THEORY.

 

Cette sitcom, racontant les déboires de deux jeunes physiciens, Leonard Hofstadter (Johnny Galecki) et Sheldon Cooper, deux « geeks » colocataires du même appartement, et dont la vie est compliquée par la présence en face de chez eux de la jolie Penny (Kaley Cuoco), serveuse aux rêves d’actrice, fait un malheur auprès desdits « geeks » américains qui ont vite fait de l’insupportable – et irrésistiblement comique – Sheldon un de leurs frères de fiction. Il faut dire que le comportement franchement et férocement asocial de Sheldon fait tout le sel de la série ; ses excentricités dont Leonard, le « normal » fait souvent les frais, sont une source de gags permanents.

Sheldon est un surdoué de la physique théorique, mais une catastrophe sociale ambulante. Il faut dire qu’il tire une extrême fierté de son parcours et de ses aptitudes : entré à l’université à 11 ans, détenteur de nombreux prix de physique, doctorats en sciences et maîtrises, Sheldon a un QI de 187 et une mémoire photographique (ou éidétique). Malheureusement pour lui (mais heureusement pour le spectateur), ses talents ne l’ont pas rendu modeste ; Sheldon est tellement persuadé de sa supériorité intellectuelle qu’il rabaisse souvent Leonard et leurs amis Howard et Rajesh. Ce qui ne l’empêche pas de participer, à sa façon, à leurs activités durant leur temps libre : jouer aux jeux vidéo et aux jeux de rôles, se faire des marathons de films, discuter de leurs recherches, etc., bref, d’être des « geeks » dans toute leur splendeur.

Socialement inepte, Sheldon prend tout au pied de la lettre et ne peut tenir une simple conversation normale. Il ne s’intéresse pas vraiment à son entourage, même s’il devient le confident de Leonard et Penny. Ceci à son grand désagrément, l’histoire d’amour entre son colocataire et sa voisine perturbant son goût maniaque pour l’ordre et le calme. En dehors des sciences et de la théorie des cordes, son champ d’expertises, Sheldon a la passion des trains, sujet sur lequel il est intarissable, et a pour seul héros et modèle Spock, le logique Vulcain de STAR TREK. Sheldon souffre par ailleurs de TOCS liés à la phobie des germes, et suit des rituels quotidiens précis, s’asseyant à la même place chaque jour, programmant méthodiquement ses sorties dans un restaurant différent chaque jour de la semaine, etc. Il ne supporte ni l’alcool ni le café, qui ont sur lui des effets désastreux. Complétons le portrait de l’énergumène par ses relations avec ses proches. En dehors de ses quelques amis, Sheldon n’a pas beaucoup de relations. Mis à part Amy Farrah Fowler, une neurobiologiste bien « atteinte » comme lui, avec qui il a une liaison toute platonique, et sa mère Mary, évangélique convaincue, la seule personne avec qui il se montre sincère.

Au vu de toutes ces caractéristiques, il ne fait donc aucun doute que Sheldon Cooper est un personnage « Aspie » évident. Pourtant, les auteurs de la série et son interprète s’en défendent, mûs par une sorte de réflexe de défense « hollywoodien », sur l’air de « je l’ai dit mais ne je l’ai pas dit fort »… Cette prudence excessive, un poil hypocrite, trouve son explication probable dans l’exigence du politiquement correct qui a pour le moins parasité les relations entre les scénaristes/producteurs/réalisateurs de fictions, et les groupes de défense des minorités ethniques/sexuelles/religieuses et des handicapés… Il faut dire qu’aux USA, ces lobbies sont souvent prêts à sonner la charge, sans trop de subtilité, contre toute représentation jugée négative à l’encontre de toute différence.

Les créateurs de BIG BANG THEORY anticipent ainsi les reproches éventuels qui leur seraient faits, ce qui est quand même un peu dommage ; d’autant que Jim Parsons, récompensé de plusieurs Emmys et Golden Globes pour son interprétation, contribue à populariser à sa façon les Aspies en faisant de Sheldon un personnage somme toute très attachant, grâce à ses défauts. Bazinga !

Cf. Spock

 

A suivre…

 

Ludovic Fauchier.

1 commentaire à “Aspie, or not Aspie ? Le Petit Abécédaire Asperger, chapitre 3”


  1. 0 Fauchier 20 oct 2012 à 16:53

    bravo tout simplement pour tous ces « portraits »

    Répondre

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