Archives pour mars 2014

Aux disparus de l’hiver 2014…

Bonjour chers amis neurotypiques !

Je n’ai pas donné trop de nouvelles ces dernières semaines, tout simplement en raison d’une grosse flemme hivernale (qui ne m’a pas empêché d’aller voir d’excellents films comme American Bluff ou The Grand Budapest Hotel) et de quelques problèmes techniques récurrents sur le site hébergeur de mon blog, ce qui m’a quelque peu démotivé pour écrire pendant un temps. Je ne vous oublie pas, rassurez-vous. Voilà un petit texte commémorant à sa façon les souvenirs de quelques personnalités du Cinéma qui nous ont quitté durant ce trimestre hivernal. La Grande Faucheuse n’a malheureusement pas chômé, en emportant ces femmes et hommes venus d’horizons très différents. Ils méritaient bien d’être cités dans ces pages.

 

Ludovic Fauchier.

 

Aux héros oubliés 2014... Philip Seymour Hoffman

Philip Seymour Hoffman (1967-2014). La nouvelle du décès du comédien le 2 février dernier, emporté par une overdose fatale, a été un choc pour la communauté des acteurs américains. Les chiffres ne trompent pas : en un peu plus de vingt années de métier à l’écran, Hoffman décrocha 54 nominations et 73 prix divers pour ses rôles au cinéma, parmi lesquels trois nominations aux Oscars, autant aux Golden Globes, et deux victoires en 2005, l’Oscar et le Golden Globe pour son interprétation de l’écrivain Truman Capote dans le film homonyme de Bennett Miller. Hoffman incarna une belle galerie de rôles phénoménaux, aussi bien dans les films indépendants que les productions prestigieuses des studios.

Très corpulent, la peau rosâtre, la voix grave, affublé d’une tête massive, Hoffman pouvait aussi bien interpréter les personnages sympathiques que les individus les plus louches. Une constante dans ses rôles : ses personnages étaient souvent bourrés de complexes, des hommes solitaires, parfois inquiétants et manipulateurs, très souvent marginalisés. On le vit apparaître dans des seconds rôles, comme Dusty, le chasseur de tornades bien allumé du Twister de Jan de Bont (1996). Et depuis, les personnages marquants n’ont pas manqué dans sa filmographie : Scotty J., perchman gay amoureux malheureux de l’acteur porno Dirk Diggler (Mark Wahlberg) dans Boogie Nights, première collaboration avec son ami réalisateur Paul Thomas Anderson ; Brandt, conseiller hyper-coincé du Big Lebowski des frères Coen ; Allen, adepte des appels téléphoniques obscènes dans Happiness ; Phil, l’aide-soignant compréhensif dans Magnolia ; le journaliste rock Lester Bangs, mentor du jeune héros de Presque Célèbre ; Dean, patron rancunier d’une ligne de téléphone rose dans Punch-Drunk Love ; Jacob, professeur d’université, tourmenté par son amour pour une de ses étudiantes (Anna Paquin) dans La 25ème Heure ; le défroqué Révérend Veasey, compagnon d’infortune du fugitif joué par Jude Law dans Cold Mountain ; Owen Davian, le trafiquant d’armes international qui mène la vie dure à Tom Cruise dans Mission Impossible III ; Andy Hanson, pitoyable organisateur d’un braquage qui tourne très mal dans le dernier film de Sidney Lumet, Before the Devil knows you’re dead (7 heures 58 ce matin-là) ; Gus Avrakotos, agent de la CIA « bras cassé » qui aide le député Charlie Wilson (Tom Hanks) à financer les insurgés afghans dans La Guerre de Charlie Wilson de Mike Nichols ; la voix de Max, autiste obèse très angoissé dans le film d’animation Mary & Max ; le père Flynn, soupçonné de pédophilie dans Doute ; Lancaster Dodd, charismatique gourou très inspiré de L. Ron Hubbard, le père de l’Eglise de Scientologie dans The Master, etc. Et bien sûr, le flamboyant écrivain Truman Capote, qui s’empare d’un triste fait divers criminel pour écrire son chef-d’oeuvre littéraire, De Sang-Froid. Un beau tableau prématurément interrompu pour Philip Seymour Hoffman, dont le dernier rôle au cinéma sera celui de Plutarch Heavensbee dans Hunger Games : la Révolte, qui sortira en deux parties. 

 

Aux héros oubliés 2014... Wojciech Kilar

Mea culpa… le nom de Wojciech Kilar (1932-2013) aurait dû figurer sur la liste des personnes disparues en 2013 dans un de mes précédents blogs. Car cette très grande figure du monde musical s’est éteinte le 29 décembre 2013, sans que l’information ait été particulièrement relayée. Kilar travailla pourtant inlassablement durant plus de cinquante années, faisant partie, avec des compatriotes aussi célèbres que Krzysztof Penderecki, de la grande vague musicale avant-gardiste polonaise qui apparut au cours des années 1960. Ancien étudiant de l’Académie Musicale de Katowice, puis ancien élève de Nadia Boulanger, Kilar travailla très tôt comme compositeur de musique de films à l’époque où le cinéma polonais fut en plein boom. Il travailla ainsi avec des cinéastes réputés comme Wojciech Haas, Andrzej Wajda (pour lequel il signa notamment les musiques de La Terre de la Grande Promesse, Korczak ou Pan Tadeusz) et surtout Krzysztof Zanussi. La qualité de son travail dépassa les frontières de sa Pologne natale ; Kilar composa de très belles musiques pour des artistes aussi variés que Paul Grimault (Le Roi et l’Oiseau), Jane Campion (Portrait de Femme), James Gray (La Nuit nous appartient, Two Lovers) ou Roman Polanski (Le Pianiste, qui lui valut le César de la Meilleure Musique, ainsi que La Jeune Fille et la Mort et l’envoûtante partition de La Neuvième Porte). Indirectement, Kilar est aussi lié à La Liste de Schindler de Steven Spielberg ; le réalisateur utilisa sa magnifique composition Exodus (à ne pas confondre avec la musique du film d’Otto Preminger, due à Ernest Gold) pour la bande-annonce du film. Mais Kilar est surtout connu dans le monde entier pour la musique du Dracula de Francis Ford Coppola, une musique qui fut par la suite souvent employée à tort et à travers pour les bandes-annonces hollywoodiennes (y compris dans un film de Stallone…). Le réalisateur du Parrain sut faire preuve de bon goût en engageant le compositeur polonais, signant une sublime partition, tour à tour hypnotique, oppressante, romantique et enfiévrée. Plus qu’une simple musique de film, une vraie œuvre d’artiste à la mesure de ce grand compositeur très discret.

 

Aux héros oubliés 2014... Harold Ramis

Harold Ramis (1944-2014). Si vous vous réveillez tous les jours à 6 heures du matin, au son d’une irritante chansonnette de Sonny & Cher, et que vous avez la désagréable impression de revivre la même journée que la veille, n’oubliez pas de saluer la mémoire d’Harold Ramis, réalisateur du fameux Groundhog Day (Un Jour Sans Fin), petit bijou de comédie où Bill Murray est condamné à revivre sans cesse une journée de m… Ramis, à la fois scénariste, réalisateur et comédien, était un visage familier de la comédie américaine de ces dernières décennies, lié pour toujours à la génération des hurluberlus apparus à la fin des années 1970 grâce aux émissions de la radio et de la télévision (le Saturday Night Live Show, le National Lampoon) : Bill Murray, Dan Aykroyd, les regrettés John Belushi et John Candy, etc. Ramis, natif de Chicago comme beaucoup de ses collègues et amis, était un étudiant contestataire des sixties, un marxiste plutôt Groucho et Harpo que Karl… Doué pour l’écriture, il commença à travailler comme journaliste et auteur de pièces, croisant vite les histrions Belushi ou Murray durant les années de vaches maigres. Particulièrement doué pour l’écriture comique, Ramis se fit d’abord connaître comme scénariste de National Lampoon’s Animal House (American College, 1977), le film de John Landis qui fit de Belushi une star. Quelques années plus tard, on retrouvera Ramis co-auteur et interprète des aventures surnaturelles de Ghostbusters (S.O.S. Fantômes, 1984), aux côtés de ses compères Murray et Aykroyd devant les caméras d’Ivan Reitman. Triomphe au box-office pour ce film devenu culte, où Ramis jouait le très sérieux Egon Spengler, l’intello binoclard de la bande de chasseurs de spectres, collectionneur invétéré de champignons, et concepteurs des packs à protons (ne jamais croiser les effluves). Succès qui appellera une suite un peu moins inspirée, mais néanmoins plaisante, en 1989.

Harold Ramis resta au service de la comédie, devenant lui-même réalisateur. On lui doit le cultissime Caddyshack (Le Golf en folie, 1980), qui révéla Murray en gardien de terrain de golf prêt à détruire un inoffensif chien de prairie façon Apocalypse Now ! Sa plus belle réussite restera évidemment Groundhog Day, une merveille d’écriture comique. Rappelons que Bill Murray y jouait un présentateur météo absolument odieux, coincé dans la petite ville de Punxsutawney pour les besoins d’un lénifiant reportage sur la Fête de la Marmotte. A cause d’un paradoxe temporel inexplicable, il se voit revivre la même journée indéfiniment. Plus étonnant encore, personne d’autre ne se rend compte de la répétition, y compris sa charmante productrice (Andie MacDowell, qui n’a jamais été aussi adorable que dans ce film)… Le coup de génie du film, d’une simplicité à toute épreuve, n’est pas de chercher pourquoi le personnage est piégé dans cette boucle temporelle infinie ; ce qui intéresse Ramis, c’est de montrer comment son anti-héros va s’en accommoder, puis chercher à s’en sortir en se débarrassant difficilement de ses mauvaises habitudes, propres à tout un chacun. Derrière les gags bien dosés (les scènes de drague, le kidnapping de la marmotte, l’insupportable assureur casse-pieds qui se colle au héros tous les matins), le ton du film devient plus mélancolique en cours de route. Ramis signera aussi d’autres comédies de bonne facture, comme Multiplicity (lourdement traduit en français Mes Doubles, Ma Femme et Moi) avec un Michael Keaton cloné en trois exemplaires, ou Analyze This (Mafia Blues, 1999), avec Billy Crystal en psychanalyste forcé de soigner les angoisses d’un mafioso joué par Robert De Niro, s’autoparodiant ici avec bonheur. Ramis continuera de signer des comédies jusqu’à son dernier film, L’An Un : des débuts difficiles, avec Jack Black en homme des cavernes, et préparait avec Aykroyd et Reitman le retour des S.O.S. Fantômes, avant son décès.

 

Aux héros oubliés 2014... Alain Resnais

Alain Resnais (1922-2014), dont la disparition le 1er mars dernier a (sincèrement ?) ému le petit monde du cinéma français… Au risque de passer pour un gros rustre, j’ai bien peur de ne pas pouvoir me mêler au concert des louanges unanimes, pour la simple raison que je n’ai guère vu que quelques-uns de ses films ; et, ses courts-métrages (et éventuellement un film) mis à part, les raisons de son succès restent un mystère. Enfin, bref… Rappelons que le cinéaste français, qui se forma à l’IDHEC comme monteur et au théâtre (le Cours Simon, le Théâtre des Armées), se fit d’abord remarquer pour la qualité de ses excellents courts-métrages documentaires, dont les plus marquants se distinguent toujours par leur qualité esthétique et sonore, et l’efficacité de leur montage : ce sont des œuvres telles que Guernica (1950), où la voix de Maria Casarès hante les images du célèbre tableau de Picasso ; Les statues meurent aussi (1953) coréalisé avec Chris Marker, film anticolonialiste récompensé du Prix Jean Vigo, et qui sera interdit pendant huit ans ; et, bien sûr, le célèbre Nuit et brouillard (1955), également récompensé du Prix Jean Vigo, l’un des tous premiers films (si ce n’est le tout premier) à oser aborder frontalement l’horreur des camps de concentration et d’extermination nazis. Près de soixante années ont passé, et le propos du film (un monologue écrit par Jean Cayrol, résistant français déporté à Mauthausen) reste toujours pertinent. Le montage d’images en couleurs, paisibles, étrangement bucoliques, alternant avec les archives des scènes atroces des camps, en noir et blanc, reste remarquable et terriblement efficace. Par ces films, Resnais devint l’un des inspirateurs de la Nouvelle Vague, sans pour autant faire partie du « clan » des enfants terribles Godard, Chabrol, Truffaut et compagnie, qui, pour le meilleur ou le pire, allaient changer le cinéma français.

Il faut bien citer les longs-métrages de Resnais, qui dès 1959 remporte le succès, mais divisera tout autant (ceci avant qu’une espèce de consensus mou se fasse autour de son œuvre) : Hiroshima mon amour écrit par Marguerite Duras ; L’Année dernière à Marienbad (1961) écrit avec Alain Robbe-Grillet ; Muriel ou le Temps d’un Retour (1963) avec Delphine Seyrig ; La Guerre est finie (1966) avec le grand Yves Montand, sur un scénario de Jorge Semprun ; Je t’aime, je t’aime (1968), œuvre de science-fiction déconstruite avec Claude Rich ; Stavisky (1974) qui ramène Jean-Paul Belmondo à un cinéma bien plus sérieux que ses pitreries de l’époque ; l’épouvantable pensum Providence (1977) avec John Gielgud, Dirk Bogarde et Ellen Burstyn ; le non moins pesant Mon oncle d’Amérique (1980) avec Gérard Depardieu et Nicole Garcia, film qui tente d’illustrer (sans donner l’impression de les comprendre) les travaux du neurobiologiste Henri Laborit. Puis, depuis 1983 et La Vie est un roman, pratiquement aucun de ses films ne se fera sans sa dernière compagne, Sabine Azéma, ainsi que les fidèles André Dussollier et Pierre Arditi, présents également dans la majeure partie de ses films suivants. Resnais signera L’Amour à mort (1984), Mélo (1986), I want to go home (1989) avec Depardieu et Adolph Green (fameux compositeur, parolier et scénariste des grandes comédies musicales de la MGM), le diptyque Smoking / No Smoking écrit par Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri (1993) que Resnais retrouvera pour On connaît la chanson (1997) ; puis, enfin, Pas sur la bouche (2003), Cœurs (2006), Les Herbes folles (2009) et Vous n’avez encore rien vu (2012), avant son dernier film, Aimer, boire et chanter, qui sortira dans les prochains jours.

 

Aux héros oubliés 2014... Sir Run Run Shaw

Sir Run Run Shaw (1907-2014), nom légendaire de l’industrie du cinéma de Hong Kong, fut l’un des fondateurs du mythique studio Shaw Brothers. Sixième membre de sa fratrie, il n’était donc pas l’aîné des frères Shaw (…). Un studio dont le nom reste synonyme de grands mélodrames, de films de sabre (les fameux wu xia pian de King Hu, dont le chef-d’oeuvre de 1966 L’Hirondelle d’Or, qui seront les ancêtres inspirateurs de Tigre et Dragon ou autre Secret des Poignards Volants), de films d’arts martiaux et de productions fantastiques souvent bien délirantes. Pas forcément que des réussites, mais souvent des grands succès populaires ayant lancé un très grand nombre d’acteurs et cinéastes de l’ancienne colonie (Bruce Lee, toutefois, lui « échappera »). Et les chercheurs de série B, les petits scarabées fous furieux de pellicules asiatiques délirantes, comme Quentin Tarantino et consorts, garderont un souvenir ému des titres produits par Sir Run Run Shaw, de 1955 (L’Impératrice Yang Kwei-Fei, signé du grand cinéaste japonais Kenji Mizoguchi) à 1985 (Les Disciples de la 36e Chambre, faisant suite au succès de 1978, La 36e Chambre de Shaolin de Liu Chia-Liang) ; comme La légende des 7 Vampires d’Or (avec Peter Cushing affrontant des vampires asiatiques, forcément adeptes des arts martiaux), Le Colosse de Hong Kong (un King Kong local, bien plus fun à regarder que le sinistre remake produit par Dino de Laurentiis en 1976) ou l’ahurissant Inframan… On vous fera grâce, par contre, des titres français franchement débiles et racistes qui ont été servis au début des années 1970, quand les films d’arts martiaux de la Shaw Brothers ont débarqué dans notre beau pays si ouvert d’esprit. On n’oubliera pas, par contre, de signaler que Sir Run Run Shaw fut aussi le coproducteur exécutif d’un certain Blade Runner sorti en 1982 !

 

Aux héros oubliés 2014... Shirley Temple

Shirley Temple (1928-2014). Les plus jeunes (et même beaucoup de moins jeunes) auront sans doute du mal à croire qu’un jour, une fillette ait pu être la reine du box-office américain et devenir un symbole national d’optimisme dans un pays plongé dans une grave dépression économique. D’autant plus difficile à croire que, de nos jours, les baby stars arrivant à l’âge soi-disant de raison exaspèrent plus qu’ils n’attendrissent. Rien de tout ça avec Shirley Temple, qui fut durant les années 1930 la petite fille idéale à la bonne humeur communicative. Une gamine reconnaissable entre toutes à ses boucles d’or (titre français d’un de ses films les plus célèbres, Curly Top, en 1935), ses fossettes aux joues et ses numéros chantés et dansés – dont ses numéros de claquettes, en solo ou en duo avec son grand copain Bill « Bojangles » Robinson (voir notamment un numéro extraordinaire des deux complices dans le grand escalier de The Little Colonel). La petite princesse d’Hollywood reçut un Oscar spécial à l’âge de six ans, fut invitée et citée en exemple par le président Franklin D. Roosevelt, tourna avec John Ford, inspira un tableau à Salvador Dali et figure toujours sur la légendaire pochette du Sergeant Pepper’s Lonely Hearts Club Band des Beatles. Et même célèbre, alors que son image était vendue dans le monde entier (son nom inspira même un cocktail !), la demoiselle se montrait toujours polie et aimable, jamais pourrie par le succès. Une autre époque, vraiment…

Elle débuta dès ses trois ans dans les courts-métrages Baby Burlesks, où elle se montrait déjà excellente imitatrice de Marlene Dietrich ; sous l’œil vigilant de sa mère, le bout de chou se fera remarquer en chantant dans le film Stand up and cheer, en 1934, pour la 20th Century Fox. Succès direct, et, durant quatre ans, la petite Shirley va devenir la star préférée du public américain ; des numéros musicaux à sa mesure, comme ses chansons les plus connues, On the good ship Lollipop dans Bright Eyes (1934) ou Animal Crackers in my soup dans Boucles d’or, lui vaudront l’affection immédiate du public. Professionnelle sur les tournages, toujours joyeuse, la gamine savait aussi, à l’écran, désarmer les cœurs endurcis des vieux ronchons comme Lionel Barrymore (The Little Colonel) ou Victor McLaglen dans Wee Willie Winkie (La Mascotte du Régiment, 1936), comédie due à John Ford. Même le plus bourru des cinéastes venus d’Irlande se montra bienveillant avec la poupette !… Le public, évidemment versatile, se détourna cependant d’elle au profit de nouvelles jeunes stars (Deanna Durbin ou Judy Garland, qui lui ravira le rôle de Dorothy pour Le Magicien d’Oz) ; en grandissant, Shirley Temple s’éloignera sagement des studios pour continuer sa scolarité. On la retrouvera jeune femme, engagée par David O. Selznick dans des rôles secondaires, dont tout de même quelques très grands classiques : Depuis ton départ (1944), beau mélodrame de John Cromwell avec Claudette Colbert, Jennifer Jones et Joseph Cotten ; la comédie The Bachelor and the Bobby-soxer (Deux sœurs vivaient en paix, 1947), où elle est la petite sœur de Myrna Loy, étudiante en socquettes qui s’amourache de Cary Grant ; et, en 1948, elle retrouve John Ford dans Fort Apache (Le Massacre de Fort Apache), jouant la fille du sévère Henry Fonda qui vient semer le trouble chez les jeunes coqs du 7ème de Cavalerie. Heureusement, John Wayne et ses sergents (McLaglen, Pedro Armendariz) viennent y mettre bon ordre ! La carrière cinématographique de Shirley Temple s’arrêtera à l’âge légal de sa majorité, en 1949 ; divorcée puis remariée, elle fera quelques apparitions à la télévision, tout en s’engageant dans d’autres activités. On la retrouvera ainsi, bien des années plus tard, toujours pimpante et joyeuse, représentante des Etats-Unis à l’ONU en 1968, et ambassadrice au Ghana (de 1974 à 1976) et en Tchécoslovaquie, au moment de la Révolution de Velours, en 1990.

 

Aux héros oubliés 2014... Saul Zaentz

Saül Zaentz (1921-2014). Producteur atypique, qui fit tardivement carrière dans l’industrie cinématographique américaine, en ne produisant que onze films en tout et pour tout, détenteur de trois Oscars du Meilleur Film, Saul Zaentz resta un indépendant tenant fermement tête aux majors. Zaentz était un personnage au parcours singulier, un véritable self-made man qui se fit connaître tout d’abord dans l’industrie du disque, en devenant, dans les années 1960, le patron de Fantasy Records, réputé notamment pour avoir produit les albums du groupe Creedence Clearwater Revival. Avant d’en arriver là, Zaentz connut une jeunesse difficile. Fils de réfugiés juifs polonais, il quitta ceux-ci à l’âge de quinze ans pour effectuer des petits boulots, et gagner sa vie en jouant aux cartes ; en pleine période de Grande Dépression, il lui arrivait souvent de voyager en faisant du stop ou en grimpant dans les trains de marchandises. Après avoir fait son service militaire durant la 2ème Guerre Mondiale, le jeune Zaentz étudia l’élevage d’animaux, travailla dans une ferme, avant de se tourner vers les études en gestion d’entreprise. En 1950, entré pour travailler chez un distributeur de disques de San Francisco, Zaentz comprit vite la nécessité de se constituer un solide carnet d’adresses ; arrivé chez Fantasy Records en 1955, Zaentz finira par acquérir la direction du label en 1967, entérinant ainsi une vraie success story à l’américaine.

C’est au tournant des années 1970 que Zaentz, bien établi, se tournera vers la production cinématographique. Ne produisant qu’un film à la fois, et s’y investissant à fond, le bonhomme aura donc une filmographie particulièrement réduite, mais riche en récompenses prestigieuses dues à ses associations avec des réalisateurs de tout premier plan. Zaentz, en tant que producteur, obtint donc trois Oscars du Meilleur Film : deux pour les plus célèbres films du cinéaste tchèque Milos Forman, à savoir Vol au-dessus d’un Nid de Coucou (1975) et Amadeus (1984), la troisième  pour le mélodrame d’Anthony Minghella, Le Patient Anglais (1997). Les amateurs d’heroic fantasy se souviendront que Zaentz fut aussi le producteur de la toute première adaptation du Seigneur des Anneaux par Ralph Bakshi, en 1978, bien avant Peter Jackson. Une entreprise quasiment suicidaire pour un résultat final franchement curieux : le film, utilisant l’animation en rotoscope (superposition d’images animées par-dessus des prises de vues avec de vrais acteurs), compressait la moitié de la monumentale trilogie de J.R.R. Tolkien en un seul film de deux heures. Malgré une narration simplifiée et une esthétique défaillante, le film eut un certain succès. On citera aussi, parmi les autres productions de Saul Zaentz, le très bon et méconnu film de Peter Weir, Mosquito Coast (1986) avec un Harrison Ford inattendu, très différent de ses rôles habituels ; L’Insoutenable Légèreté de l’Être (1988) de Philip Kaufman, adaptation du roman de Milan Kundera avec Daniel Day-Lewis et Juliette Binoche ; ou En Liberté dans les Champs du Seigneur (1991) du brésilien Hector Babenco, avec Tom Berenger et Darryl Hannah. La filmographie de Saul Zaentz comportera également un troisième et dernier film signé de Milos Forman, Les Fantômes de Goya (2005) avec Natalie Portman et Javier Bardem.

 

Ludovic Fauchier (le Grand Fauchier, ennemi de la Grande Faucheuse).



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