GET ON UP, de Tate Taylor
L’histoire :
jalonnée de succès, la vie de James Brown (Chadwick Boseman), »le Parrain de la Soul« , n’a jamais été un long fleuve tranquille… Enfant, il vécut dans une cabane en forêt à Augusta, en Caroline du Sud. Sans argent, ses parents, Joe et Susie Brown (Lennie James et Viola Davis) se séparèrent, Susie laissant l’enfant seul avec son père qui le battait. James fut confié à sa tante Honey (Octavia Spencer), tenancière de bordel. Délinquant, arrêté à 17 ans, condamné à une peine de prison, James rencontra Bobby Byrd (Nelsan Ellis) avec qui il se lia d’amitié ; libéré, James fut accueilli par la famille de Bobby et rejoignit son groupe de gospel, bientôt nommé The Famous Flames. Doué pour le chant, danseur extraordinaire et charmeur avec les femmes, James suivit les traces de Little Richard, après lui avoir temporairement volé la vedette dans un concert local. Remarqué par les agents de King Records, James Brown signa un contrat en 1956 pour ses premières chansons à succès, sous l’égide de Ben Bart (Dan Aykroyd). Intransigeant, prenant conscience de son influence sur la communauté noire américaine en pleine lutte pour les Droits Civiques, James Brown refusait de perdre un combat, quitte à mettre tout en péril : ses mariages, ses relations professionnelles et son amitié avec Bobby Byrd…
La critique :
Tate Taylor, à qui l’on doit l’adaptation réussie du roman The Help (« subtilement » devenu en français La Couleur des Sentiments…), s’associe ici à Mick Jagger et Brian Grazer, associé de longue date de Ron Howard (et dont la coupe de cheveux est déjà en soi une ode à l’esprit funk), pour produire et réaliser Get On Up, retraçant la vie tumultueuse de James Brown. Personnage explosif dont les shows sur scène furent des plus électrisants, Mr. Brown rejoint donc ici des collègues prestigieux ayant déjà eu droit à leur propre biopic. L’exercice est évidemment sans réelles surprises ; bien que très agréable à suivre, Get On Up provoque ce léger sentiment de déjà vu propre aux biopics sur les stars de la chanson US ; on pense bien sûr à Ray, superbe film de Taylor Hackford sur la vie de Ray Charles (Jamie Foxx), ou à Walk the Line avec Joaquin Phoenix en Johnny Cash plus vrai que nature. Deux films à succès, sortis il y a près de dix ans maintenant, donnant l’impression que Get On Up arrive en retard après la bataille…
La recette est donc éprouvée, la mise en scène classique, mais ne boudons pas non plus notre plaisir ; Get On Up compte tout de même suffisamment de bons points pour être apprécié. D’abord, évidemment, pour son excellente bande son qui nous permet de redécouvrir l’évolution musicale de James Brown, un des fers de lance de la soul music et du funk des grandes heures. I Feel Good, Daddy’s got a brand new bag, It’s a man’s man’s World, Sex Machine, Get on up off that thing… ils répondent tous présents et n’ont rien perdu de leur énergie. Intéressant aussi de voir à quel point le scénario du film, loin d’être linéaire, adopte la structure « funky » des chansons de James Brown, en alternant les différentes époques du Parrain de la Soul sans perdre le spectateur en cours de route. Et le film ne ménage pas son « héros », loin d’être aussi sympathique qu’un Ray Charles. James Brown fut un battant, certes (idée joliment résumée par cette scène d’enfance, où, battu sur le ring d’un tournoi de boxe, il se relève au rythme de l’orchestre et trouve les bases de ses légendaires pas de danse), mais aussi un être terriblement égoïste, mari violent, et businessman magouilleur, entre autres écarts de conduite (la scène d’ouverture vaut à elle seule son pesant de cacahuètes).
Tate Taylor a aussi marqué des points grâce à son casting : pas de stars ici, mais une pléthore d’acteurs solides et de nouveaux venus prometteurs. Viola Davis et Octavia Spencer, formidables gouvernantes rebelles de The Help, reviennent ici pour des rôles brefs mais déterminants, incarnant les deux « mères » du chanteur ; Davis a notamment droit à une scène de confrontation bouleversante avec son fils. Les amateurs de soul music remarqueront aussi la prestation de la splendide chanteuse Jill Scott, incarnant ici Deidre Brown, seconde épouse du chanteur ; les nostalgiques des Blues Brothers ne pourront, eux, pas passer à côté des allusions au film de John Landis. Outre une scène de gospel très familière, on retrouve avec plaisir ce bon vieux Dan Aykroyd, fin connaisseur en la matière, qui incarne ici le manager de James Brown ! Et, outre ces menus plaisirs, Get On Up repose surtout sur la découverte de deux comédiens que l’on va suivre avec attention ; Nelsan Ellis hérite du rôle difficile de Bobby Byrd, l’ami gentiment effacé, loyal mais écrasé par le « monstre » Brown, et livre une jolie prestation. Quant à Chadwick Boseman (découvert l’an dernier aux USA dans 42, où il jouait le baseballeur Jackie Robinson), il explose littéralement dans le rôle de James Brown. La ressemblance physique, vocale et psychologique est parfaite, et le voir enflammer la scène comme son redoutable modèle est un sacré exploit de comédien. Carrière à suivre de très près, donc…
Ludovic Fauchier. I feel good !

Bonus numéro 1 : on n’allait pas ne pas citer cette fabuleuse participation du vrai James Brown dans l’épopée des Blues Brothers… 34 ans avant d’incarner le manager de Brown, Ben Bart, un Dan Aykroyd (tout mince et jeunot !) y recevait la grâce divine, après le regretté John Belushi. Bienvenue dans la congrégation du Révérend-Père James Brown (doublé en allemand, und fragen Sie mich nicht warum).

Bonus numéro 2 : la belle Jill Scott, une des meilleures voix de la chanson US, joue le rôle de Deidre « Dee Dee » Brown dans Get On Up. La vidéo ci-dessus vous donne un aperçu de son talent, avec l’interprétation en live de son tube Golden à la Maison Blanche, devant les Obamas conquis. On les comprend !
La fiche technique :
Réalisé par Tate Taylor ; scénario de Jez et John-Henry Butterworth ; produit par Brian Grazer, Erica Huggins, Mick Jagger, Victoria Pearman et Robin Mulcahy Fisichella (Imagine Entertainment / Jagged Films / Wyolah Films)
Musique : Thomas Newman ; photographie : Stephen Goldblatt ; montage : Michael McCusker
Direction artistique : Jesse Rosenthal ; décors : Mark Ricker ; costumes : Sharen Davis
Distribution : Universal Pictures
Durée : 2 heures 19
Caméras : Arri Alexa, Canon EOS 500, Canon EOS Rebel T3 et Ikegami EC-35
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