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Archives pour janvier 2015

En bref… MORTDECAI / Charlie Mortdecai

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MORTDECAI / Charlie Mortdecai, de David Koepp

L’histoire :

Lord Charlie Mortdecai (Johnny Depp), marchand d’art excentrique, parcourt le monde à la recherche d’œuvres rares à acquérir et revendre, au prix fort, à des clients peu recommandables ; il s’en sort toujours grâce à son fidèle valet et homme de main, Jock (Paul Bettany). Mais le grand train de vie de Charlie lui vaut de sérieux ennuis financiers, au grand dam de sa chère épouse Johanna (Gwyneth Paltrow), rebutée par ailleurs par la moustache toute neuve de son mari… 

L’assassinat d’une restauratrice de tableaux, et le vol d’une rarissime peinture de Goya, met Charlie dans une situation délicate. L’inspecteur Alistair Martland (Ewan McGregor), amoureux malheureux de Johanna, mène l’enquête et réalise que la toile a sans doute été dérobée par Spinoza, un associé de Charlie, après que la restauratrice ait été assassinée par un certain Strago (Jonny Pasvolsky). Et tandis que Martland se rapproche de sa femme, Charlie, flanqué de Jock, met un point d’honneur à récupérer le Goya volé - quitte à se mettre dans de beaux draps…

 

Mortdecai

La critique :

Fais-nous mal, Johnny, Johnny… On a beau aimer Johnny Depp pour le suivre depuis pratiquement ses débuts (Edward aux mains d’argent, 25 ans déjà !?), il faut bien admettre que l’acteur est entré dans une phase critique. A l’instar de nombre de confrères entrés dans leurs cinquante ans, il semble être en pente descendante depuis quelques années. A l’exception de quelques films sympathiques (Rango et Lone Ranger, entre autres), Depp a bien mal choisi ses projets, entre un Pirates des Caraïbes 4 patachon, un Dark Shadows en relatif pilotage automatique ou une prestation embrumée dans Transcendance. Le jeune homme rêveur, charmeur et mélancolique des débuts s’est même mué au fil du temps en un énorme cabotin… Ce serait pardonnable (reconnaissons que le voir faire ses numéros à la Buster Keaton est toujours amusant), si les films étaient bons, mais malheureusement, depuis Public Enemies (six ans déjà), ce cher Johnny semble brader son talent. Malheureusement, Charlie Mortdecai ne changera pas la donne. 

Tout le film est un beau gâchis, un ego trip de premier ordre, Depp surjouant son propre personnage sous son aspect le plus irritant : un dandy richissime, imbu de lui-même, déconnecté de la réalité, mais dénué de tout ce qui rendait ses personnages précédents sympathiques. Une forme de démission qui touche aussi ses partenaires, contraints à faire du surplace avec des personnages creux, et le réalisateur David Koepp, bien plus inspiré quand il faisait de bons petits films fantastiques sans prétention (Stir of Echoes / Hypnose, et Fenêtre Secrète, avec le même Johnny Depp). Plus lassant qu’amusant, Charlie Mortdecai tente mal de raccorder les comédies sophistiquées à la Blake Edwards aux poses trash des films de gangsters de Guy Ritchie. Très mauvais mélange… Les running gags sont interminables (la moustache…) quand ils devraient être légers, Johnny continue de faire du Jack Sparrow mais ne fait pas rire ; quant au « sommet » du burlesque attendu dans le film, il est atteint dans une scène de gastro collective durant une party sans intérêt. Les autres acteurs font ce qu’ils peuvent pour sauver les meubles, sans être convaincus. Gwyneth Paltrow a toujours son charme habituel, Ewan McGregor se demande pourquoi il joue les utilités, et Paul Bettany sauve les meubles en faisant sourire le spectateur via son personnage de valet souffre-douleur. Mais franchement, c’est trop peu pour rendre le film sympathique. Depp, producteur du film, a logiquement attiré les foudres des critiques, le film a plongé dans l’indifférence générale au box-office, et, cette fois, on peut considérer que c’était justice…

On espère que cette nouvelle contre-performance réveillera enfin l’ami Johnny, et l’incitera à prendre de nouveau des risques sur ses prochains films. Peut-être Black Mass, qui le fera revenir dans les films de gangsters purs et durs, nous ramènera l’acteur intense de Donnie Brasco et Public Enemies. Croisons les doigts, et coupons vite cette triste moustache…

 

Ludovic Fauchier.

 

La fiche technique :

Réalisé par David Koepp ; scénario d’Eric Aronson, d’après le roman « Dont’t point that thing at me » de Kyril Bonfiglioli ; produit par Christi Dembrowski, Johnny Depp, Andrew Lazar, Patrick McCormick, Gigi Pritzker, Monique Feig et Kenneth Kokin (Huayi Brothers Media / Infinitum Nihil / Mad Chance Productions / OddLot Entertainment)

Musique : Mark Ronson et Geoff Zanelli ; photo : Florian Hoffmeister ; montage : Derek Ambrosi et Jill Savitt

Direction artistique : Patrick Rolfe ; décors : James Merifield ; costumes : Ruth Myers

Distribution USA : Lionsgate / Distribution France : Metropolitan Filmexport

Caméras : Arri Alexa et Red Epic

Durée : 1 heure 46

En bref… UNBROKEN / Invincible

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UNBROKEN / Invincible, d’Angelina Jolie

L’histoire :

Avril 1943. L’équipage du Liberator B-24 « Super Man » participe à une dangereuse mission de bombardement sur l’île de Nauru, dans le Pacifique. Parmi les membres de l’équipage, se trouve Louis « Louie » Zamperini (Jack O’Connell). Champion d’athlétisme avant la 2ème Guerre Mondiale, Louie se préparait aux Jeux Olympiques de 1940, avant que la 2ème Guerre Mondiale n’éclate. Cet enfant d’immigrés italiens installés à Torrance, en Californie, eut une enfance difficile, entre les petits larcins qu’il commettait et les menaces des petites brutes de son quartier. Mais son frère aîné Pete, remarquant le don du gamin pour la course, devint son entraîneur. Grâce à lui, Louie devint un brillant athlète, finissant même par se qualifier pour les JO de Berlin, en 1936. Sans finir sur le podium, Louie établit cependant le record de vitesse dans le dernier tour de la finale des 5000 mètres, effectué en 56 secondes.

Quelques jours après la mission sur Nauru, Louie, ses amis et les remplaçants des blessés sont chargés d’une mission de secours à bord du « Green Hornet », un B-24 endommagé. Leurs pires craintes se réalisent quand l’avion tombe en panne et se crashe dans l’Océan Pacifique. Seuls Louie, Phil (Domnhall Gleeson) et Mac (Finn Wittrock) en réchappent. Pratiquement sans nourriture, et cernés par les requins, les trois hommes dérivent sur l’Océan Pacifique sur deux canots pneumatiques…

 

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La critique :

On le sait, Angelina Jolie est une battante. Il suffit, si on en doute, de jeter non seulement un œil à sa filmographie, mais aussi à ses combats pour l’aide humanitaire. Utilisant sa position de superstar pour ses actions dans ce domaine, elle a tout naturellement orienté sa carrière en passant à la mise en scène, pour aborder des sujets à portée humaniste. Cela n’a pas été sans mal, vu la mauvaise réception accordée à son premier essai comme cinéaste : Au pays du Sang et du Miel, une romance située durant la guerre civile en Yougoslavie, qui n’avait pas convaincu à sa sortie en 2011. Pas découragée, elle s’est attelée à la mise en scène et à la production d’Unbroken (Invincible, donc, en français), relatant la lutte pour la survie de Louis Zamperini, champion d’athlétisme et rescapé des camps de prisonniers japonais durant la 2ème Guerre Mondiale. Force est de constater qu’Angelina Jolie s’en tire avec les honneurs, révélant peut-être bien au passage un talent naissant de femme cinéaste dans un sujet généralement considéré comme chasse gardée de ses confrères masculins.

 

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C’est à la fois un solide film de guerre, un bon drame dans la solide tradition américaine, et une histoire de survie et de courage souvent touchante. Grâce à un script sans grande surprise mais solidement charpenté, signé de quelques pointures dont, surprise, les frères Coen (leur talent de scénaristes est d’ailleurs de plus en plus sollicité par d’illustres confrères, puisqu’ils sont aussi les co-auteurs de St. James Park, le prochain film de Steven Spielberg), Unbroken défend de belles valeurs universelles sur la capacité de résilience d’un être humain traversant les pires épreuves. Sans être didactique ou moralisatrice, Angelina Jolie nous attache à suivre les drames traversés par Louis Zamperini (Jack O’Connell, solide), qui réussit, chose rare, à trouver le courage de pardonner à ses geôliers. Il reviendra, plus de cinquante années après la guerre, au Japon pour porter la flamme olympique, sans aucune rancune pour ses anciens ennemis. Vu ce qui nous est montré de leur part dans le film, on ne peut que saluer la force morale de l’ancien champion disparu l’an dernier.

 

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Unbroken permet aussi d’apprécier les qualités de réalisatrice d’Angelina Jolie. Elle s’avère tout à fait à l’aise dans la gestion de séquences à la logistique complexe, comme cette scène d’introduction qui nous plonge au beau milieu d’un combat aérien impeccablement géré (aucune confusion sur les personnages et leur position dans le bombardier assailli par les Zéros). L’ensemble du film est toujours géré avec clarté, sans effets de style redondants. On aura quand même une petite préférence pour la partie du film consacrée au naufrage des rescapés dans le Pacifique ; notamment quand ceux-ci se retrouvent dans une situation à faire cauchemarder les nostalgiques des Dents de la Mer, les naufragés mitraillés par un avion japonais devant plonger sous leurs canots, parmi les squales… Peut-être plus prévisible par la suite quand on suit Zamperini dans les camps militaires japonais (le souvenir du Pont de la Rivière Kwaï, de Furyo ou d’Empire du Soleil y est sûrement pour quelque chose), Unbroken reste intéressant pour la confrontation violente entre le héros et Watanabe, un caporal tortionnaire. De son propre aveu, la réalisatrice avoue s’être inspirée d’un très bon film de Sidney Lumet, The Hill (La Colline des Hommes Perdus) où Sean Connery était le prisonnier rebelle d’un camp disciplinaire. On y retrouve en effet une âpreté similaire… sans aller toutefois aussi loin dans la noirceur. Si Unbroken compte un défaut, ce serait qu’il évite, au contraire du film de Lumet, de remettre vraiment en question l’obstination de son personnage principal à subir les pires coups tordus du caporal en question. Autre petit bémol : la musique du film, signée Alexandre Desplat, compositeur pourtant généralement inspiré, force parfois un peu trop l’émotion à coups de violons.

Ces réserves mises à part, ne boudons pas notre plaisir, et saluons les efforts d’Angelina Jolie réalisatrice comme il se doit. Angie-la-lionne prouve qu’elle peut se battre sur tous les fronts, et s’atteler avec une rigueur de cinéaste vétérane à des sujets difficiles.

Ludovic Fauchier.

 

 

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Ci-dessus : le documentaire de la chaîne CBS The Great Zamperini relate les évènements vécus par Louis Zamperini, le héros d’Unbroken.

 

La fiche technique :

Réalisé par Angelina Jolie ; scénario de Joel & Ethan Coen, Richard LaGravense et William Nicholson, d’après le livre de Laura Hillenbrand ; produit par Matthew Baer, Angelina Jolie, Erwin Stoff, Clayton Townsend et Joseph P. Reidy (3 Arts Entertainment / Jolie Pas / Legendary Pictures) 

Musique : Alexandre Desplat ; photo : Roger Deakins ; montage : William Goldenberg et Tim Squyres

Direction artistique : Charlie Revai ; décors : Jon Hutman ; costumes : Louise Frogley

Distribution : Universal Pictures

Caméras : Arri Alexa XT

Durée : 2 heures 17

En bref… EXODUS : GODS AND KINGS

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EXODUS : GODS AND KINGS, de Ridley Scott

L’histoire :

1300 ans avant notre ère. Sous le règne du Pharaon Séti (John Turturro), l’Egypte assoit son hégémonie face aux royaumes rivaux. Le Pharaon vieillissant prépare sa succession pour son fils Ramsès (Joel Edgerton), mais favorise un autre membre de la famille royale : Moïse (Christian Bale), le général de ses armées, qu’il a traité comme son autre fils depuis l’enfance. Durant une bataille contre les envahisseurs Hittites, Moïse sauve la vie de Ramsès ; un geste d’éclat annoncé par des prophéties, et qui ferait de Moïse un grand chef. Peu après, Moïse se rend, à la place de Ramsès, à Pithom, où les esclaves Hébreux fabriquent statues et idoles. Il est horrifié de voir les esclaves brutalisés par le Vice-Roi Hegep (Ben Mendelsohn) et ses hommes de main. Lorsque Moïse rencontre le vieux Noun (Ben Kingsley), il est stupéfait d’apprendre par celui-ci qu’il est un Hébreu. Sa naissance correspondait à la venue annoncée d’un libérateur pour le peuple Hébreu, réduit en esclavage depuis quatre siècles ; alors qu’il n’était qu’un nourrisson, Moïse fut confié à la fille de Pharaon qui l’éleva comme son fils. Informé, Hegep dénonce les origines de Moïse à Ramsès. Forcé d’admettre qu’il est Hébreu, Moïse est condamné à l’exil dans le désert… 

 

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La critique :

Il est difficile de revenir en arrière… Dans ces pages, on apprécie et on défend le travail de Ridley Scott, mais il faut bien admettre que, depuis quelques films, le cinéaste anglais est en panne d’inspiration. Après un Prometheus inégal (la faute à des réécritures de script cherchant à raccorder artificiellement le film à l’univers d’Alien), et un Counselor (Cartel) épouvantablement bavard et figé, Scott revient ici à un genre qui lui est familier, la grande épopée historique, un domaine qui lui a permis d’aborder l’Antiquité romaine, le Moyen Âge, la conquête des Amériques et les guerres napoléoniennes. Le voir traiter sous un angle réaliste (ou disons, semi-réaliste) l’histoire la plus célèbre de l’Ancien Testament avec Exodus : Gods and Kings semblait prometteur… Cependant, le résultat laisse pointer la déception, derrière les images épiques en diable. Si Gladiator, en son temps, avait su dépoussiérer le péplum en « remakant » largement un grand classique (La Chute de l’Empire Romain, d’Anthony Mann), Exodus : Gods and Kings, revisitant l’histoire de Moïse, souffre de ne pouvoir supplanter le souvenir des Dix Commandements de Cecil B. DeMille… et aussi de Gladiator, une pâle campagne publicitaire rappelant au spectateur que le même Scott a déjà fait mieux. Scott, réalisateur ouvertement agnostique (l’exact opposé d’un DeMille n’hésitant jamais à en faire trop pour « convertir » le spectateur des années 50 à sa vision), tente ici de garder une approche plus pragmatique du parcours du héros campé par Christian Bale, et des miracles auxquels il assiste et participe. Malheureusement, faute d’un script inspiré, Exodus peine à convaincre. Mieux vaut revoir le classique de DeMille avec Charlton Heston et Yul Brynner ; malgré son côté souvent kitsch, sentencieux et démodé, le spectacle biblique des Dix Commandements emportait l’adhésion par sa splendeur visuelle. Pas étonnant que des cinéastes de la trempe de Martin Scorsese ou Steven Spielberg (un temps intéressé d’ailleurs par Exodus) le citent comme un de leurs films favoris. Et dommage pour Scott d’avoir un script cherchant, de façon assez répétitive, à reprendre le récit de Gladiator dans ses grandes lignes, lui empruntant même ses dialogues (« S’il dort aussi bien, c’est qu’il est aimé » est ainsi servi à deux reprises…).

 

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Parti sur des bases assez mal ajustées, Exodus s’est logiquement pris une volée de bois vert au box office. La qualité du spectacle n’est pas forcément la cause (il y a suffisamment d’idées visuelles pour faire passer la pilule), mais on sent que le public s’est lassé de ce type d’épopée. A moins que le traitement sceptique, distant, du sujet religieux du film soit la vraie cause de son échec. Cette approche n’a pas plu à tout le monde. Il est assez inquiétant, d’ailleurs, de voir le torrent de critiques adressées au film par divers pays, journaux et groupes religieux, pour des motifs moins artistiques que religieux et raciaux. Dur pour Ridley Scott, qui a dû essuyer des accusations de racisme à cause de son casting blanc (argument médiocre régulièrement utilisé par les tenants de la « véracité » historique… qui ne se sont jamais plaints pourtant, à la sortie de Gladiator, en voyant un Romain espagnol joué par un acteur australien !), d’erreurs historiques ou d’interprétation gênant l’explication théologique officielle (les Plaies d’Egypte et la traversée de la Mer Rouge), quand ce n’est pas le film lui-même qui se retrouve purement et simplement interdit d’être distribué dans les pays musulmans. Moïse, étant vu comme un prophète d’Allah, ne peut du coup être représenté en image… Donc : interdiction pure et simple du film au Maroc, en Egypte ou dans les Emirats.

Etant personnellement agnostique, m’intéressant aux religions uniquement pour leur valeur mythique et symbolique, mais ne comprenant fichtrement RIEN aux questions de doctrine et rhétorique religieuse, je ne peux juger le film sur ces motifs. Je m’inquiète par contre de voir autant d’anathèmes et d’interdits dressés de la sorte (voir aussi l’hostilité à l’intéressant Noé de Darren Aronofsky, sorti l’an dernier), contre une œuvre artistique, même si celle-ci est passable. Les déclarations franches de Ridley Scott voyant la religion comme  »la source de tous les maux » n’ont certainement pas calmé les esprits… A la rigueur, je comprendrais mieux, en tant que cinéphile, les critiques portant sur les faiblesses d’écriture du film, ou sur des choix de casting assez hasardeux ; le très new-yorkais John Turturro, qu’on a plus l’habitude de voir faire le dingo chez les frères Coen, est un curieux choix en Pharaon ; et on regrette que Sigourney Weaver, cette chère Ripley, soit trop peu présente en épouse de ce dernier. Sans doute a-t-elle été « sacrifiée » au montage, laissant supposer que des scènes inédites seront réintégrées dans une éventuelle sortie DVD. On est donc très loin des questions religieuses, ou du respect de la véracité historique, qui ne sauraient expliquer les faiblesses du film de Scott… 

 

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Faute de mieux, on se contentera dans Exodus de rares moments marquants. Ridley Scott retrouve une partie de son inspiration dans la création visuelle de l’histoire de Moïse, faisant toujours preuve d’un sens du détail cruel. A ce titre, la recréation des Dix Plaies d’Egypte garantit les meilleures scènes du film. Voir ce moment particulièrement brutal, digne des Dents de la Mer, où les crocodiles assaillent un bateau. Le sang des infortunés pêcheurs se mêle aux eaux du Nil, qui peu à peu se transforme en fleuve de sang… Une scène graphique au possible, dénuée de dialogue et donc purement cinématographique. Les autres Plaies sont du même acabit. Dommage cependant que la traversée de la Mer Rouge, avec son traitement final très « blockbuster » contemporain n’ait pas la même force. Au passage, la logique agnostique du film offre une explication très plausible des phénomènes constatés ; avec beaucoup d’ironie mordante, Scott montre même un scientifique de la cour de Pharaon oser expliquer les miracles survenus, sans être écouté. Il finit même exécuté pour avoir ainsi osé suggérer que Pharaon et son entourage de prêtres n’ont ainsi aucun contrôle sur le monde ! Difficile, dans une théocratie où l’on écoute les prêtres et leurs prophéties floues, de faire valoir un point de vue rationnel.

La même attitude caractérise aussi le traitement de Moïse et Ramsès, au centre du récit. Impossible de ne pas penser que l’histoire de ces deux « frères » rivaux, a certainement touché une corde sensible chez Ridley Scott, qui dédie le film à son frère et collègue disparu il y a deux ans, Tony Scott. On saura gré au cinéaste de vouloir sortir des archétypes des Dix Commandements ; ici, Moïse doute, refuse de suivre aveuglément les ordres divins et fomente une révolte armée, tout en donnant les signes évidents d’une sévère schizophrénie le faisant parler dans le vide à un « enfant » imaginaire. La scène où, enseveli par un glissement de terrain, il rencontre l’envoyé divin pour la première fois, est aussi l’une des rares bonnes scènes du film. Ramsès, vu par Ridley Scott, est aussi un personnage moins monolithique que prévu. Dommage cependant que ces tentatives n’aboutissent qu’à un film bien décevant. A charge pour le réalisateur, âgé de 77 ans, de redorer son blason avec The Martian, un survival de science-fiction qu’il prépare avec Matt Damon.

 

Ludovic Fauchier.

 

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ci-dessus : « I need a general », extrait de la belle musique d’Exodus composée par Alberto Iglesias, avec le support d’Harry Gregson-Williams. L’influence évidente de Richard Wagner !

 

La fiche technique :

Réalisé par Ridley Scott ; scénario d’Adam Cooper & Bill Collage, Jeffrey Caine et Steven Zaillian ; produit par Peter Chernin, Mohamed El Raie, Mark Huffam, Teresa Kelly, Michael Schaefer, Ridley Scott, Mirel Soliman, Adam Somner et Jenno Topping (Chernin Entertainment / Scott Free Productions / Babieka / Volcano Films)

Musique : Alberto Iglesias ; photo : Dariusz Wolski ; montage : Billy Rich

Direction artistique : Benjamin Fernandez et Marc Homes ; décors : Arthur Max ; costumes : Janty Yates

Effets spéciaux : Neil Corbould ; effets spéciaux visuels : Asregardoo Arundi, James D. Fleming et Jessica Norman (Double Negative / 4DMax / FBFX / Method Studios / MPC / One Of Us / Peerless Camera Company) ; cascades : Rob Inch

Distribution : 20th Century Fox

Caméras : Red Epic

Durée : 2 heures 30

L’Or du Nain – LE HOBBIT : LA BATAILLE DES CINQ ARMEES

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Le Hobbit : La Bataille des Cinq Armées, de Peter Jackson

 

L’histoire : Thorïn Oakenshield (Richard Armitage), l’héritier du royaume Nain d’Erebor, a accompli sa quête. Lui et ses compagnons, avec le Hobbit Bilbo Baggins (Martin Freeman), ont pu chasser de la montagne le Dragon Smaug (Benedict Cumberbatch). Malheureusement, Smaug furieux s’est envolé pour se venger sur ceux qui ont osé aidé ses ennemis : les Humains d’Esgaroth, la Cité sur le Lac. En quelques instants, la ville est ravagée par le monstre. Il faut tout le courage d’un seul homme, l’archer Bard (Luke Evans), pour que Smaug soit finalement abattu. Bard devient le héros et le nouveau chef des rescapés, épuisés et affamés. Il décide de les guider vers la cité en ruines de Dale, au pied de la montagne, espérant obtenir l’aide des Nains ayant repris possession de leurs fabuleuses richesses.

Tout le monde ignore cependant ce qu’a vu Gandalf (Ian McKellen) : prisonnier dans la citadelle maudite de Dol Guldur, le vieux magicien a été vaincu par le Nécromancien, qui n’est autre que Sauron, le Seigneur Ténébreux retrouvant sa puissance passée. Sauron prépare un assaut massif sur la montagne Erebor, envoyant les troupes du redoutable Orc pâle, Azog le Profanateur (Manu Bennett), ennemi mortel de Thorïn. Obnubilé par la pierre sacrée Arkenstone subtilisée par un Bilbo inquiet, Thorïn devient de plus en plus soupçonneux et agressif. Et l’arrivée des Elfes du Roi Thranduil (Lee Pace), venu négocier avec Thorïn la restitution d’un objet précieux, risque de mettre le feu aux poudres…

 

la critique :

 

Le Hobbit - La Bataille des Cinq Armées 03

Adieu, Terre du Milieu ?… L’aventure entamée par Peter Jackson et ses collaborateurs, il y a près de 17 ans, connaît sa fin probable avec le dernier volet du Hobbit, complétant ainsi cette « pré-saga » et celle du Seigneur des Anneaux qui lui fait suite. Qu’on mesure le parcours accompli par le cinéaste néo-zélandais entre la réalisation de ses deux trilogies… Considéré à l’époque par ceux qui n’avaient pas vu Créatures Célestes comme un « rigolo » adepte de l’humour gore, Jackson avait réussi un pari jugé impossible en adaptant l’épopée de Tolkien, que l’on croyait inadaptable ; non seulement il avait livré coup sur coup une trilogie complète et épique à souhait, mais il avait su « maltraiter » délibérément la structure des livres pour mieux en garder la portée émotionnelle, un exploit rare. Et, accessoirement, il s’était mis au niveau d’un George Lucas, d’un Steven Spielberg ou d’un James Cameron de la grande époque, en se servant de ses films pour créer une véritable grande entreprise cinématographique (au grand bénéfice médiatique de sa Nouvelle-Zélande natale) amenant avec elle de nouvelles révolutions technologiques. Voir par exemple le développement du logiciel Massive qui a littéralement dynamité la mise en scène des scènes de batailles ou les bases de la Performance Capture, entamée avec l’inoubliable transformation d’Andy Serkis en Gollum. Replongé non sans mal (ni reproches de certains « fans », un peu ingrats devant le festin offert…) dans l’univers de Tolkien avec la trilogie Le Hobbit, Peter Jackson, avec La Bataille des Cinq Armées, est cependant sorti victorieux de la bataille… Quelque peu épuisé, aussi, et on peut comprendre qu’un (léger) désenchantement pointe derrière la réussite de l’entreprise.

 

Le Hobbit - La Bataille des Cinq Armées 02

Ce désenchantement doit cependant plus à l’ambiance mélancolique qui plane sur ce chapitre final qu’à autre chose. La Bataille des Cinq Armées rappelle évidemment quelques questionnements qui ont divisé les « Jacksonophiles » et les « tolkienophiles » sur la transformation d’un roman pour enfants en trilogie très dense, développée par l’équipe du film. On pourra toujours débattre à l’infini sur l’intérêt de rajouter des personnages, des sous-intrigues et des péripéties supplémentaires : la présence de Legolas, l’histoire d’amour malheureuse Tauriel-Kili, etc. Reste que ces ajouts demeurent cohérents dans l’ensemble (même si le « fan service » pointe parfois son nez) et équilibrent le récit du Hobbit, par rapport au Seigneur des Anneaux. On peut aimer les livres de Tolkien et les juger supérieurs aux films de Jackson, on remerciera quand même ce dernier de nous avoir livré une trilogie aussi généreuse que la précédente, en éliminant les aspects les plus « enfantins » du conte originel. Qu’auraient dit les fans mécontents si Jackson avait respecté à la lettre le livre de Tolkien : personnages (Bard) qui apparaissent de nulle part comme des deus ex machina, Elfes chantants, oiseaux parlants, etc. ? Il ne s’agit pas de mépriser l’œuvre de Tolkien, bien au contraire, mais de rappeler qu’une adaptation cinématographique a ses propres spécificités narratives, et qu’elle ne peut respecter à la lettre le livre dont elle s’inspire. Pour mettre les choses au clair, la trilogie filmique du Hobbit ne sera vraiment appréciable à sa pleine mesure que lorsque les Versions Longues (qui sont les « vrais » films, à l’instar des Versions Longues des trois Seigneur des Anneaux) seront enfin toutes disponibles. Les raccourcis narratifs trop évidents (exemple : Beorn, vite éjecté du montage cinéma de La Désolation de Smaug), qui freinaient l’intérêt de cette nouvelle saga, disparaîtront dans la vision complète de cette trilogie faisant un vrai jeu de miroir avec celle du Seigneur… : départ optimiste de l’aventure (Un Voyage Inattendu et La Communauté de l’Anneau) – aggravation des conflits et dispersion des personnages mis en échec (La Désolation de Smaug et Les Deux Tours) – confrontation finale apocalyptique, et accomplissement des personnages transformés par leur quête (La Bataille des Cinq Armées et Le Retour du Roi). Ces choix narratifs suivent assez fidèlement les modèles étudiés par des mythologues comme Joseph Campbell, rappelant que ces quêtes suivent symboliquement l’évolution de leurs héros vers la maturité psychologique. Peter Jackson, Philippa Boyens et Fran Walsh se sont montré en la matière bien plus cohérents que par exemple George Lucas sur ses « préquelles » confuses de Star Wars.

 

Le Hobbit - La Bataille des Cinq Armées 06

Aussi riche en batailles et scènes d’action soit-elle, cette Bataille des Cinq Armées (l’épisode le plus court de toute la saga : « seulement » 2 heures 20 !) s’avère aussi le film le plus « psychologique » de cette trilogie. Un an après avoir laissé le spectateur pantelant à la fin « cliff-hanger » de La Désolation de Smaug, Jackson nous replonge directement au milieu de l’action : la victoire morale de Thorïn sur Smaug n’a pas suffi. Une parole malencontreuse de Bilbo, et le vieux Dragon a décidé, en grand psychopathe qu’il est, d’exercer ses représailles sur la population civile de la Ville du Lac. Cette scène de destruction à très grande échelle ne déçoit pas ; elle conclut l’affrontement du film précédent, et permet de poser les bases de ce chapitre final. Ce n’était pas tout, pour nos héros, de s’emparer d’un trésor légendaire et de vaincre son abominable gardien, encore fallait-il affronter les conséquences de leur exploit… Et l’ambiance ne prête plus à la joie : des contentieux ne sont toujours pas résolus (entre Thorïn et Thranduil), les humains exigent l’aide promise, et la méfiance s’installe, au sein même de la troupe de héros. Ces conflits  »communautaires » (qui, d’une certaine façon, sont bien les reflets de notre époque) sont les signes d’un retour d’un Mal encore plus grand, qui prendra forme comme on le sait sous la forme d’un grand Œil enflammé… Le personnage central de ce troisième film, celui qui gagne définitivement ses galons de héros tragique, n’est finalement ni Bilbo ni même Gandalf ; Thorïn Oakenshield (excellent Richard Armitage) sombre, comme promis, dans les affres du Mal du Dragon. Peter Jackson donne les meilleures scènes au Roi Nain tourmenté par la paranoïa. L’une des meilleures séquences du film le voit d’ailleurs faire face à sa propre folie, un cadeau empoisonné posthume de Smaug : une scène d’hubris qui finit par un symbolique engloutissement du héros dans une mare d’or liquide, représentant son inconscient envahi par la corruption. Une de ces idées purement visuelles, démentielles, telles que les affectionne Jackson. Sans doute s’est-il souvenu, lors de l’écriture du scénario, de l’influence majeure des légendes nordiques sur le texte de J.R.R. Tolkien. Légendes qui ont nourri les grandes œuvres majeures de Richard Wagner, notamment L’Or du Rhin. On peut voir en Thorïn un reflet positif du Nain Alberich décrit par Wagner. Un être assoiffé de pouvoir, qui fait fondre l’Or du fleuve pour en faire un Anneau de toute-puissance, réduit en esclavage son propre peuple, et hérite de pouvoirs magiques le rendant invisible ou le changeant en dragon… Tout ceci sonne très familier aux yeux des lecteurs/spectateurs de Tolkien et Jackson, non ? L’idée d’un « lien » possible entre Thorïn, les autres rois-héritiers du récit (Thranduil, Bard), Smaug, le trésor maudit et la menace latente de Sauron renvoie évidemment à la geste wagnérienne (et elle provient des propres notes de Tolkien, concernant le lien entre les maléfiques Smaug et Sauron). Heureusement, Thorïn fera in extremis preuve d’un sursaut moral dans l’épreuve, réaction qui aura des répercussions décisives dans l’histoire. Saluons le travail des scénaristes qui ont su lier toutes les intrigues au dilemme de Thorïn ; un remarquable tour de passe-passe où chaque conflit (rivalité Thorïn-Thranduil-Bard, méfiance entre Bilbo et Thorïn, love story malheureuse Legolas-Tauriel-Kili, affrontement Thorïn-Azog, opposition filiale entre Legolas et Thranduil…) se nourrit du même objectif, la revendication du trésor des Nains, et influence le suivant.

 

Le Hobbit - La Bataille des Cinq Armées 05

Quant à notre cher Hobbit, il n’est pas oublié, même si son rôle est plus discret. Dans tout ce tumulte, un petit être apparemment insignifiant a aussi un grand rôle à jouer… et quelque chose à se pardonner. N’oublions pas qu’il a commis une terrible gaffe en révélant un indice fatal au dragon (« Monteur de Tonneaux… »), et se sait directement responsable de l’anéantissement de la Ville du Lac par le monstre. Un peu truqueur dans l’âme, l’ami Bilbo avait déjà caché une précieuse information à Gandalf, concernant son préssssieux anneau magique acquis par tricherie (ce n’est pas Gollum qui dira le contraire, n’est-ce pas ?). Il lui faut grandir et recevoir quelques vérités amères dans l’épreuve ; à travers « l’affaire » de l’Arkenstone, le Hobbit « pépère », qui s’inquiétait pour l’état de ses assiettes, devient donc ici un habile négociateur politique, cherchant à régler pacifiquement un grave conflit politique. Il lui faut pour cela sacrifier l’amitié de Thorïn (rétribution pour les risques que ce dernier lui avait quand même fait prendre en l’envoyant seul dans l’antre de Smaug ?…), et subir la méfiance des autres chefs. Avec l’aide de Gandalf, s’il n’empêche pas l’inévitable guerre, Bilbo intègre enfin l’âge adulte, et en ressort transformé, comme le lui avait prédit le vieux magicien.

 

Le Hobbit - La Bataille des Cinq Armées 01

Passer en revue les personnages de La Bataille des Cinq Armées prendrait hélas un temps fou… Qu’on se rassure, les grandes figures du récit tolkienien bénéficient tous d’un traitement de faveur de la part de Peter Jackson, qui tient une nouvelle fois ses promesses en matière de grand spectacle mythique. Sans surpasser les ahurissantes batailles apocalyptiques du Retour du Roi, La Bataille… regorge d’images mémorables. L’alliance père-fils entre Bard (le charisme tranquille de Luke Evans, possible successeur spirituel « celtique » à Sean Connery et Liam Neeson) et Baïn face au dragon qui fond sur eux. Le déchaînement des pouvoirs de Dame Galadriel (annonciateurs de l’épreuve du miroir dans La Communauté de l’Anneau…) passant ici à l’action durant le sauvetage de Gandalf à Dol Guldur. Le dialogue de sourds entre Thorïn et Bard, isolés de part et d’autre d’une muraille de pierre. L’intronisation sur le champ de bataille d’un ultime personnage bien badass, le coriace Daïn Ironfoot (Billy Connolly) et son sanglier de guerre. Ces assauts déments de l’armée Orc lançant des vers fouisseurs géants tout droit sortis de Dune sur les combattants. Les exploits guerriers de Legolas (Orlando Bloom), définitivement ennemi de la gravité. Le duel final entre Thorïn et Azog le Profanateur, sur un lac gelé évoquant le glorieux souvenir d’Alexandre Nevski, le film d’Eisenstein  »grand ancêtre » de toutes les épopées médiévales au cinéma… Reste qu’au milieu de tous ces grands moments de bruit et de fureur, Peter Jackson n’a pas oublié les simples enjeux émotionnels. Et la scène la plus touchante est d’une simplicité absolue : c’est ce moment où, après la bataille, Bilbo et Gandalf fument en silence, scellant leur amitié dans une scène d’une retenue muette, digne des meilleurs films de John Ford.

Désolé pour les puristes grincheux, mais cette saga, malgré ses défauts inhérents, a toujours du cœur. Peter Jackson a visé juste. Le cinéaste va maintenant pouvoir revenir à des projets plus intimistes, comme il l’avait annoncé (qu’il n’oublie quand même pas sa promesse de faire le second Tintin avec Spielberg !), et laisser derrière lui sa chère Terre du Milieu. Espérer voir un jour une adaptation filmée du Silmarillion est donc, pour l’instant, très improbable ; Christopher Tolkien, le fils de J.R.R. Tolkien refuse obstinément toute adaptation de cette œuvre bien plus difficile encore que ne l’était Le Seigneur des Anneaux… On verra dans dix ans, Mr. Jackson ?

 

Ludovic Fauchier (le Nain schizophrène).

 

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La fiche technique :

Réalisé par Peter Jackson ; scénario de Philippa Boyens, Peter Jackson, Fran Walsh et Guillermo Del Toro, d’après le roman « Le Hobbit » de J.R.R. Tolkien ; produit par Philippa Boyens, Carolynne Cunningham, Peter Jackson, Fran Walsh et Zane Weiner (MGM / New Line Cinema / 3 Foot 7 / WingNut Films)

Musique : Howard Shore ; photo : Andrew Lesnie ; montage : Jabez Olssen

Direction artistique : Simon Bright et Andy McLaren ; décors : Dan Hennah ; costumes : Bob Burk et Ann Maskrey ; dessins conceptuels : John Howe et Alan Lee

Effets spéciaux visuels : Matt Aitken, Joe Letteri et Eric Saindon (Weta Digital / Weta Workshop)

Distribution : Warner Bros.

Caméras : Red Epic, Red One MX et Sony DVW-790

Durée : 2 heures 24



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