BIG EYES, de Tim Burton
L’Histoire :
racontée par le journaliste Dick Nolan (Danny Huston), l’histoire vraie de Margaret et Walter Keane, un couple d’artistes peintres ayant fait fortune dans les années 1960 grâce aux peintures « Big Eyes« , est aussi celle d’une rupture conjugale liées aux mensonges du mari, s’appropriant l’œuvre de sa femme…
Margaret Ulbrich (Amy Adams) quitte le domicile conjugal et entraîne avec elle sa petite fille Jane (Delaney Raye), pour partir vivre à San Francisco, où elle devient l’amie de Dee Ann (Krysten Ritter). Vivant modestement, Margaret passe son temps libre à peindre des portraits d’enfants aux grands yeux tristes et fixes, Jane lui servant de modèle. Lors d’un week-end, un peintre la rencontre, apprécie son travail et la convainc de monnayer ses tableaux au meilleur prix : il s’appelle Walter Keane (Christoph Waltz). Walter est tellement charmant et enthousiaste que la timide Margaret en tombe vite amoureuse. Peu importe que Walter ait »oublié » de lui dire qu’il est agent immobilier, et non peintre: ils se marient bientôt.
Déterminé à vendre les toiles de Margaret, ainsi que les siennes, au galeriste Ruben (Jason Schwartzman), Walter se voit éconduit par ce dernier, qui ne jure que par l’art moderne. Il n’est pas plus heureux lorsqu’il persuade Banducci (Jon Polito), un patron de night-club, d’exposer leurs peintures ; celui-ci les expose près des toilettes, et une altercation éclate entre les deux hommes. La publicité inattendue de l’incident fait connaître les fameuses peintures de Margaret, signant ses toiles du seul nom de « Keane ». Walter s’occupe de leur publicité et en un rien de temps, les peintures « Big Eyes » de Margaret se vendent à prix d’or. Mais Walter affirme être le seul auteur des peintures, sans avoir consulté au préalable Margaret…
La critique :
on croyait l’avoir égaré ces dernières années… mais, bonne nouvelle, Tim Burton est de retour, en pleine possession de ses moyens. Et Big Eyes, biopic à contre-courant des codes du genre, est pour lui l’occasion de rompre avec quelques mauvaises habitudes, tout en renouant avec son univers plus personnel. Le cinéaste de Burbank est maintenant suffisamment blanchi sous le harnois pour savoir ce qu’il veut désormais filmer, à l’approche de la soixantaine. Il était temps, pourrait-on dire. On sentait que Burton était quelque peu « bloqué » ces dernières années par des projets de pure commande, qui ne l’intéressaient qu’assez peu. Un sentiment d’impasse se dégageait d’œuvres imposées par les studios, de La Planète des Singes à Alice au Pays des Merveilles, ou encore Dark Shadows, sur lesquels le cinéaste d’Edward aux Mains d’Argent devait se contenter de livrer des œuvres visuellement somptueuses, mais en « pilotage automatique ». Son film d’animation Frankenweenie relevait le niveau, bien qu’il s’agissait d’un remake de son court-métrage de jeunesse. Bonne nouvelle, en renouant avec le duo de scénaristes Scott Alexander – Larry Karaszewski (auteurs d’Ed Wood), Tim Burton tourne le dos aux facilités de ses dernières années : Big Eyes affiche un budget modeste pour un tournage « à l’arraché », le récit est porté sur les personnages, le choix des acteurs est fait en conséquence (un casting inédit, pas de Johnny Depp en total cabotinage, ni de la fidèle Helena Bonham Carter)… et les effets spéciaux visuels numériques sont rangés au placard – ils sont réduits à une seule courte séquence. Bref, en tournant Big Eyes, Tim Burton s’est imposé une sévère et salutaire discipline. On ne s’étonnera pas, du coup, que le film soit son œuvre la plus originale depuis Big Fish (onze ans déjà), et la plus maîtrisée depuis Ed Wood.
Impossible de ne pas faire le rapprochement entre Ed Wood et Big Eyes, puisque les deux films portant la patte de l’écriture des scénaristes Alexander et Karaszewski. Deux trublions qui, entre deux commandes de studios, affichent un goût particulier pour les grands misfits de l’Histoire américaine : rappelons qu’ils ont aussi signé les scénarii de deux très bons films de Milos Forman, Larry Flynt et Man on the Moon (consacré à la vie du comédien Andy Kaufman, qui poussait le concept de canular au-delà des limites permises). Les deux énergumènes retournent les conventions du biopic ; leurs personnages sont méprisés, hors des normes, leurs carrières ressemblent plus à des accidents… mais ils apprécient leur folie tenant de l’inconscience, et leurs paradoxes. Ed Wood est connu pour être le « pire cinéaste ayant jamais existé » (mais aussi un artiste se battant pour réaliser ses rêves – quitte à enchaîner les nanars et exploiter sans vergogne une star déchue), Larry Flynt un pornographe milliardaire forcément vulgaire (mais qui devient un champion de la liberté d’expression, en réponse à l’hypocrisie puritaine de son pays), Andy Kaufman un artiste incompréhensible (mais dont les créations et les personnages les plus barrés continuent de lui survivre)… et maintenant, Margaret et Walter Keane complètent cette incroyable galerie. Soit une jeune femme craintive et timide à l’excès, dont les portraits d’enfants qui ont fait sa célébrité sont à la fois un sommet de kitsch et l’expression de sa personnalité singulière – et donc, une œuvre artistique à part entière. Et son mari, phénoménal baratineur, surdoué en relations publiques… en fait, un personnage pitoyable qui finit par croire en ses propres mensonges. Un escroc parfois même touchant, dont le besoin de reconnaissance devient véritablement inquiétant quand il finit par « étouffer » sa moitié, la seule âme créative du couple.
On a ainsi, dans Big Eyes, la description saisissante d’un couple-entité dont la personnalité se scinde en deux : l’artiste renfermée, utilisée contre son gré, et le mari-agent publicitaire en représentation permanente, obnubilé par l’exploitation commerciale et le succès médiatique. Une situation que Burton, grand collectionneur des œuvres de Margaret Keane, connaît bien puisqu’elle renvoie à son propre parcours : réalisateur atypique dans l’industrie cinématographique hollywoodienne, il a su se ménager une place à part, réaliser des films très personnels, mais il a aussi dû lutter avec des studios dont les cadres dirigeants se mêlent trop souvent de ce qui ne les regarde pas. Des ingérences, ou des impératifs commerciaux divers, qui ont parfois poussé Burton à accepter La Planète des Singes ou Alice, ou à s’épuiser dans des films morts-nés (« l’affaire » Superman Lives). On devine alors combien l’histoire des Keane, comme celle d’Ed Wood en son temps, l’a intéressé, Burton prenant fait et cause pour Margaret, tout en laissant quelques circonstances atténuantes à Walter. Big Eyes est aussi l’occasion pour Burton de parler de la notion d’art, et de la part de subjectivité qu’elle renferme, et de ce qui semble être chez lui sa contrepartie négative, le mensonge. Pas étonnant quand on voit dans sa filmographie un grand nombre de personnages « artistes » (dans des domaines qui laissent a priori perplexes), autant qu’un bon nombre de manipulateurs / escrocs, certains se trouvant même dans les deux catégories.
On a les artistes très naïfs, comme la belle-mère amatrice d’art moderne dans Beetlejuice, Edward aux Mains d’Argent, Edward Bloom (et son don pour raconter des histoires extravagantes) et le poète-braqueur de Big Fish, Victor Frankenstein (expert dans la réanimation d’animaux de compagnie décédés, dans Frankenweenie)… Mais aussi des beaux psychopathes, tels le Joker dans Batman, qui discourt d’ailleurs sur l’Art moderne après s’être livré à un mémorable saccage au musée, ou Sweeney Todd, artiste à sa façon dans le domaine du meurtre en série au rasoir à main. Dans la catégorie « manipulateurs/faussaires », Burton réservait son venin à des personnages comme Max Schreck (Batman le Défi), faux allié politique et médiatique du Pingouin, le promoteur immobilier Art Land, arnaqueur invétéré même en pleine guerre des mondes (Mars Attacks !) ou Pirelli, le faux barbier italien concurrent de Sweeney Todd. Et, au croisement de ces personnages antagonistes, Ed Wood aussi bien que Willy Wonka (Charlie et la Chocolaterie) étaient des artistes contradictoires, pris entre leurs rêves et les exigences financières ; le premier allait chercher l’argent de ses films là où il le pouvait, pour livrer des œuvres d’un goût douteux, le second organisant un concours assez tordu dans le seul but de se trouver un héritier – tout en réalisant une opération publicitaire de premier plan. Les personnages de Walter et Margaret Keane sont finalement la somme de tous ces personnages « burtoniens », entamant une relation particulière avec Ed Wood, dans le sens inverse : Ed exploitait Bela Lugosi avant de gagner son amitié, tandis qu’ici, la relation affective entre Walter et Margaret va se dégrader au fur et à mesure des mensonges du mari. Le questionnement sur l’art est par ailleurs posé dès les premières minutes du film, via une introduction par une citation d’Andy Warhol qui résume bien l’œuvre des époux Keane : « Si les gens achètent leurs peintures, c’est qu’elles sont forcément géniales !« . CQFD, et Burton d’enchaîner via un générique malin, nous présentant en très gros plan le travail de Margaret… nous croyons voir une peinture originale, avant que la caméra ne recule et ne nous dévoile qu’il s’agit en fait d’une copie multipliée à l’infini. Le travail de Margaret, détourné par Walter… Peu importe finalement que lesdites peintures aient été qualifiées de « kitsch », « bizarres » et autres commentaires bien peu flatteurs, il ne fait aucun doute pour Burton que Margaret Keane a mis son cœur et son âme dans ces images d’enfants aux grands yeux tristes. Le cinéaste aime et défend ce genre d’artistes.
Ce couple antagoniste permet aussi à Tim Burton de revenir à l’une de ses thématiques favorites, celle de la dualité. Ce n’est pas par hasard si Docteur Jekyll et Mr. Hyde est ouvertement cité dans les dialogues du film. Les Keane sont une entité assez particulière, à ce sujet-là. Si, dans les débuts de sa carrière, Burton était surtout intéressé par des personnages « doubles », partagés entre leur nature profonde et leur apparence sociale (Bruce Wayne / Batman, version Michael Keaton, en était le meilleur exemple), on l’a vu évoluer, et montrer des couples partagés entre l’isolement créatif (parfois très relatif) et l’hypocrisie sociale. Les Keane sont cependant à l’opposé du couple meurtrier de Sweeney Todd, où l’homme s’enfermait pour « créer » (comprendre : assassiner en totale impunité…) et la femme se chargeait de maintenir l’illusion tout en passant les plats macabres à la population. Ici, c’est l’inverse – sans les meurtres : une femme volontairement (?) recluse et un homme qui entretient les faux-semblants. L’occasion pour Burton, ses scénaristes et deux excellents comédiens de dresser le portrait convaincant des époux Keane et de leur relation perturbée. Amy Adams réussit une jolie performance dans le rôle de Margaret, toute en discrétion, au risque de voir son jeu sous-estimé par rapport au « show » de Christoph Waltz. La femme peintre est décrite comme une personne sensible et imaginative, mais souffrant manifestement de grandes difficultés psychologiques ; difficile d’affirmer son indépendance dans un monde alors régi par le pouvoir masculin (« fille, épouse, mère ») qui veut la réduire à une simple « potiche » consentante. Situation douloureuse à vivre pour Margaret, qui combine une grande fragilité, une timidité maladive et sans doute aussi un brin d’autisme léger (le retour en ces pages du syndrome d’Asperger !) dont elle a certains traits caractéristiques : le malaise en société, le sens de l’amitié exclusif (une seule vraie amie, Dee Ann), le besoin de s’isoler (nécessaire au calme menant à l’inspiration), les centres d’intérêt très exclusifs (outre la peinture, la numérologie…), la « naïveté » la poussant à faire confiance à un manipulateur indécrottable, et, au début de son aventure, une relative indifférence envers l’argent et les nécessités matérielles. Le tout enrobé dans un dramatique manque de confiance en elle-même et un état de peur grandissant. Il ne fait aucun doute qu’au début de l’histoire, Margaret reste encore, psychologiquement parlant, une enfant (il faut la voir travailler à peindre un berceau, ou se raccrocher à sa fille Jane, comme une bouée de sauvetage), avant d’être forcée à se battre pour obtenir la reconnaissance de son travail. Ironie de l’histoire, Margaret, après avoir vainement cherché de l’aide auprès d’un prêtre paternaliste à l’excès, saura s’émanciper de Walter et s’épanouir… en rejoignant la secte des Témoins de Jéhovah ! Histoire vraie, qui fait penser aux conversions des autres personnages du duo Alexander-Karaszewski : Ed Wood rejoignant les baptistes, et Larry Flynt devenant un super-dévot chrétien… à la différence près que ceux-ci agissaient par nécessité financière ou besoin publicitaire, là où Margaret atteindra sa maturité en se trouvant de nouveaux amis, un nouveau foyer et un nouveau style de peinture. On peut sourire du choix de vie de Margaret Keane, il n’en reste pas moins qu’Amy Adams lui rend joliment justice. La comédienne sait la rendre attachante, tout en s’adaptant à merveille à l’univers burtonien.
Et puis, il y a le « monstre », Walter… C’est peu de dire que Christoph Waltz fait des étincelles dans le rôle du vrai-faux peintre. L’acteur allemand est une fois de plus excellent dans la peau de ce manipulateur si charmant, et si inquiétant. Lui et Amy Adams se complètent à merveille dans deux registres différents ; se mettant sans cesse en scène, Walter éclipse très vite la pauvre Margaret, avec une candeur apparente si désarmante que la jeune femme n’ose pas se rebeller. Cela ne porterait pas à conséquence si Walter tombait vite le masque, mais le personnage est un grand angoissé ne supportant pas d’être rabaissé, et sa supercherie révèle chez lui des failles clairement plus inquiétantes : il s’avère être, de toute évidence, un psychopathe – pas au sens « tueur en série », mais un psychopathe ordinaire, assez pitoyable et grotesque quand il est mis au pied du mur. Andy Kaufman vu par les mêmes scénaristes cachait son insécurité derrière des personnages « indépendants » de sa propre personnalité ; Ed Wood doutait parfois de son talent et tombait dans la dépression avant de repartir de plus belle à l’attaque ; Walter Keane, tel qu’il est vu dans Big Eyes, trouve en Margaret l’exutoire à ses propres frustrations d’artiste manqué. Une courte scène, magistralement jouée par Waltz, le voit confesser à regret son manque de talent et ses envies de reconnaissance. Malheureusement, au lieu de demander l’aide et le soutien de sa femme, Walter préfère la facilité de la célébrité, et s’enfonce. Une fuite en avant, compréhensible malgré tout ; difficile de ne pas céder quand vous êtes soudain le centre de toutes les attentions, après des années de vaches maigres… Malheureusement plus doué pour les relations publiques que pour la création pure, Walter perd pied dès à la moindre contrariété. La frustration se transforme en violence et en paranoïa. Walter montre son côté « Hyde », et Margaret en fait les frais. Il n’y a guère qu’un critique d’art officiel (mémorable apparition du grand Terence Stamp) pour oser tenir tête à Walter en public ; mais même le critique en question se laisse abuser sur l’identité du véritable auteur des peintures. Margaret, elle, sera longtemps vampirisée par son époux, au point de se persuader que son atelier est « celui de Walter« ! La supercherie sera finalement découverte lorsqu’elle mettra à jour la vraie signature des premiers tableaux soi-disant peints par lui, « S. Cenic »… pseudonyme assez risible dont on ne saura jamais s’il s’agit de Walter ou d’un peintre dont il aurait usurpé l’œuvre. Walter continuera de nier l’évidence, tel un gamin pris la main dans le pot de confiture ; le chevalier servant des débuts laissera la place à un personnage pris dans ses propres mensonges, jusqu’à cette grandiose scène finale de procès. La verve des scénaristes et de Tim Burton s’en donne à cœur joie aux dépens de Walter, et Waltz nous gratifie d’une interprétation comique et inquiétante à souhait. Difficile de ne pas rire en voyant le faux peintre s’improviser témoin et avocat, consternant le juge et les jurés ! Et difficile aussi de ne pas avoir malgré tout de la sympathie pour ce pauvre faussaire…
Rien à dire enfin de négatif sur le style du film et sa mise en scène, Tim Burton retrouvant avec Big Eyes sa palette « acidulée » (impossible de ne pas penser à Edward aux Mains d’Argent, discrètement rappelé via l’image d’une banlieue rose bonbon au début du film). D’une sobriété bienvenue, la réalisation de Burton se rapproche ici de certains films de voisins de palier en cinéma comme Wes Anderson ou les frères Coen, auxquels le cinéaste emprunte des acteurs familiers (Jason Schwartzman en galeriste pincé et Jon Polito en patron de night-club) ; un classicisme apparent qui sert ici à nous faire entrer de plain pied dans l’esprit de ses deux personnages principaux. Un style discret qui rejaillit sur la partition du fidèle Danny Elfman, tout en retenue, et sur la photographie lumineuse du français Bruno Delbonnel (Inside Llewyn Davis, Amélie Poulain), jouant à merveille sur les couleurs les plus vives du répertoire « burtonien ». Un excellent travail collectif qui aurait mérité un peu plus de considération aux cérémonies officielles, Big Eyes ayant été snobé aux Oscars en dépit de ses qualités. Le lot habituel des grands films de Tim Burton… Nul doute que le film sera d’ici quelques années considéré comme une de ses meilleures œuvres. En attendant, le cinéaste va devoir laisser de côté (pour un temps ?) ses projets personnels et revenir dans le système Disney en préparant une version live de Dumbo. Espérons qu’il y garde son âme – et nous rappelle au passage sa terreur des clowns…
Ludovic Fauchier.
ci-dessus : la vraie Margaret Keane, 87 ans, évoque sa vie et son œuvre.
La Fiche Technique :
Réalisé par Tim Burton ; scénario de Scott Alexander & Larry Karaszewki ; produit par Scott Alexander, Tim Burton, Lynette Howell et Larry Karaszewski (The Weinstein Company / Silverwood Films / Tim Burton Productions / Electric City Entertainment)
Musique : Danny Elfman ; photo : Bruno Delbonnel ; montage : JC Bond
Direction artistique : Chris August ; décors : Rick Heinrichs ; costumes : Colleen Atwood
Distribution USA : The Weinstein Company / Distribution France : StudioCanal
Caméras : Arri Alexa
Durée : 1 heure 46
Un grand merci ludo, j’étais déjà quasiment persuadée d’aller voir le film mais alors là, tu m’as conquise……
Merci Céline ! Désolé de ne pas répondre plus tôt…