
DHEEPAN, de Jacques Audiard
L’histoire :
Sivadhasan (Antonythasan Jesuthasan), soldat membre des Tigres Tamouls insurgés contre le gouvernement, tente de fuir le Sri Lanka. Les passeurs clandestins lui donnent une nouvelle identité : »Dheepan », le nom d’un autre homme qui a été tué avec sa femme et sa fille des mois auparavant. Il fuit le pays en compagnie d’une jeune femme, Yalini (Kalieaswari Srinivasan), et d’une fillette de neuf ans, Illayaal (Claudine Vinasithamby), et se retrouve en France où il survit dans un premier temps comme vendeur à la sauvette.
Sivadhasan / Dheepan trouve bientôt un nouvel emploi et un toit, au Pré-Saint-Gervais. Le voilà concierge d’un petit bloc d’immeubles décrépits. L’ancien combattant, sa fausse épouse et leur « fille » partagent un minuscule logement, et tentent de s’adapter à leur nouveau monde. Les premiers mois sont difficiles : la petite fille ne trouve pas d’amis à l’école, et subit même l’ostracisme de ses petites camarades. Yalini trouve un emploi de femme de ménage chez un vieil homme, père de Brahim (Vincent Rottiers), un petit caïd libéré de prison, avec qui elle sympathise. Dheepan, lui, assiste aux petites violences quotidiennes du bloc en face du sien, là où Brahim, assigné à résidence, effectue ses trafics louches…
Impressions :
On casse certaines habitudes prises ici dans ce blog, et nous allons (brièvement) parler d’un film français (chose incroyable : plus d’un mois après Microbe et Gasoil de Gondry, l’auteur de ces lignes vient de doubler sa moyenne de films hexagonaux sur l’année !). Un film dû à Jacques Audiard, devenu l’un des rares cinéastes, d’Un Héros Très Discret à De Rouille et d’Os en passant par Un Prophète, à oser sortir du cloisonnement habituel comédie/drame qui condamne notre cinéma à une mort lente et programmée. Récompensé de la Palme d’Or à Cannes par les frères Coen, Dheepan complète l’excellente filmographie d’Audiard, suivant une famille de réfugiés sri lankais dans la morne banlieue parisienne. Banlieue qui se transforme en zone de combat et fait ressurgir les vieux démons du « père » de cette fausse famille, où il faut préserver l’illusion pour ne pas être rapatrié dans un pays ravagé par la guerre civile. Les conflits et les moments de tendresse alternent, judicieusement traités par le sens de l’écriture et de la mise en scène d’Audiard, qui suit les unions et dissensions des personnages, impeccablement interprétés par des comédiens non professionnels. Tout cela est maîtrisé sans défauts de bout en bout, le film évoluant vers un climax inexorable, d’une violence sèche digne d’un vigilante movie des seventies, le personnage principal, déterminé à sauver celle qu’il considère comme sa femme, retrouvant ses réflexes programmés de guerrier Tamoul. Un grand final tétanisant, menant à une rédemption dont on ne sait si elle est réelle ou fantasmée, et qui fait de Dheepan un excellent film.
Ludovic Fauchier.
La Fiche Technique :
Réalisé par Jacques Audiard ; scénario de Jacques Audiard, Thomas Bidegain et Noé Debré ; produit par Pascal Caucheteux (Why Not Productions / Page 114)
Musique : Nicolas Jaar ; photo : Eponine Momenceau ; montage : Juliette Welfling
Direction artistique : Héléna Klotz ; décors : Michel Barthélémy ; costumes : Chattoune
Distribution France : UGC Distribution
Caméras : Sony F55
Durée : 1 heure 49
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